dimanche 14 novembre 2010

Cuba (encore)

Crème solaire, maillots, sandales, des tonnes de livres, quelques robes d'été, une petite laine pour les soirées fraîches, des lunettes de rechange (si je les perdais, mes lunettes, hein? Ça s'est vu... Et alors à quoi bon ces tonnes de livres?). Voilà, ma valise est (presque) prête.

Dans sept petites heures, je serai à Cuba, à mi-chemin entre La Havane et Varadero, en pleine cambrousse (mais au bord de la mer, quand même!). M'en vais lire, ne rien faire, dormir et parler espagnol. Et voir les poissons, bien sûr, parce que le principal attrait de cet endroit, c'est le récif de corail, à quelques brasses, qui grouille de vie et de couleurs.


Agrandir le plan

Au fait, où ai-je bien pu fourrer mon tuba et mon masque, moi? J'allais les oublier!

Faut que je les trouve. Je bloguerai de là-bas!

mercredi 6 octobre 2010

Mais comment font-ils?

Depuis que je suis ici, je m'envoie des repas qui me paraissent gargantuesques, que les Français autour de moi avalent sans ciller en moitié moins de temps. Et que je t'ajoute un petit fromage par-ci, et madame prendra bien un petit dessert? Un petit café, peut-être... Ah, mais ce ne sont que quelques mignardises, vous mangerez ce que vous voulez.

Pavé de foie de veau et sa poêlée de gnocchi.
Hier soir, j'ai largement dépassé mes capacités, et j'ai pourtant laissé un peu de l'entrée (pétoncles et cèpes poêlés, jus de volaille), un peu du plat (pavé de foie de veau et gnocchi), un peu de fromage (dont un fourme d'ambert, ah, avec une confiture de dattes, oh!). J'ai cru que je n'avalerais plus jamais rien de ma vie. De fait, ce matin, aucune envie de petit-déjeuner, d'autant moins que m'attendait un repas dans un étoilé Michelin. Me voilà donc, à midi et demi, après une virée d'achats compulsifs dans le marché du mercredi place du Capitole et un peu aux alentours, dans ce resto minuscule aux murs anthracite (20 couverts au gros maximum).

On m'a servi avec une exquiiiiise politesse des choses exquiiiiises, que j'ai réussi à manger avec délectation tout en plaisantant avec les serveurs (qui ont réussi à plaisanter).

Mise en bouche (oh, trois petites choses mignonnes et rigolotes, rien pour se faire du souci).
J'écoute les conversations de mes voisins, et aussi les présentations des serveurs, je note.
Le plat (khadaïf de cabillaud sur crème de céleri-pomme, chou-fleur cru, émulsion de crustacés)
Entrée. (Mes voisins ont deux entrées. Moi, je suis déjà comblée.)
Plat. (Mes voisins n'ont pas les mêmes, et la récitation est plus longue. Quand mon plat arrive, je défaille: y arriverai-je?)
Dessert. (Moi qui n'en prends jamais, je n'y puis résister, mais j'en laisse la moitié. Le garçon: «Madame n'a pas aimé le praliné?»)
Café. Mignardises.

Au secours!

Je regarde mes voisins, qui ont l'air tout à fait sains d'esprit, et qui ne sont pas du tout gros. En fin de compte, je me dis que, chez eux, ils doivent manger de la salade toute l'année. Sinon, c'est trop injuste.

Le dessert: praliné fourré crème d'amande surmonté d'un sorbet poire, poire pochée fourrée à la crème d'orange, feuillantine crème caramel, mini-clafoutis à la framboise, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?
En tout cas, au final, la réponse, je suppose, c'est que ce genre de chose, une fois l'an, deux à la limite, très bien. Mais deux fois dans la même semaine, c'est jeter des perles aux pourceaux. Et s'il y a des gens qui carburent à ça, franchement, je les plains.

Bon, c'est pas tout ça. Faut encore que je fasse ma valise, parce que je prends le train demain pour Carcassonne, où j'espère qu'on me fichera la paix avec la gastronomie: je veux juste manger du foie gras et du confit, compris?

lundi 4 octobre 2010

À table!

Ce midi, dîner (ou déjeuner? ah, chuis toute mêlée!) à L'Amphitryon, un peu en dehors de Toulouse. Rien que pour vous dire, ce soir, je n'ai pas soupé (ou dîné, comme vous voudrez). Amuse-doigts (sic), mise en bouche, entrée no 1, entrée no 2, plat, dessert, café, mignardises, avec l'accord mets-vins, j'ai cru mourir (de plaisir!).
Avec ça que j'ai vécu ma première vraie expérience de cuisine moléculaire, ce que je résumerais en gros par: l'art de déstabiliser le client en lui servant des trucs qui n'ont pas l'air de ce qu'ils sont. Ou qui ne sont pas ce qu'ils ont l'air d'être.
Tout cela et bel et bon, vraiment, mais vous savez quoi? Rien ne vaut les vraies affaires au vrais jus. L'escalope de foie gras sur tomates éclatées et le pigeonneau rôti et fumé avec son jus, sur la purée et le carpaccio de chou-fleur (ô, la bonne idée!!!), je vais vous dire, m'ont mis les larmes aux yeux (vraiment), bien plus que les langoustines en pannequets de nouilles udon ou ce biscuit qui semblait de chocolat fourré fraise, mais qui était en fait d'olives noires fourré de sorbet de tomate.

Mais euh, dans tous les cas, on est dans des sommets jamais atteints, n'est-ce pas?

Et je ne vous parle pas des amuse-doigts, de petites choses aussi insolites que délectables, parce que je ne veux quand même pas tout vous dire, il me reste un article à écrire, eh, ho.


Après, promenade dans les vieilles rues de Toulouse, qui n'est rose, m'a-t-on dit, que depuis que ses habitants ont cessé de crépir de blanc les murs de brique (ils trouvaient que ça faisait pauvre au regard de la pierre). De fait, dans certains quartiers moins touristiques, on voit encore des vestiges de crépi sur les murs. Ce n'est pas moins joli, c'est seulement différent.

Il a fait aujourd'hui un temps de fin du monde, avec un vent à m'arracher mes lunettes. On l'appelle le vent d'autan, du provençal altanus (vent de la haute mer). Je l'aurais appelé mistral ou tramontane, mais il semble qu'il y ait ici autant de noms pour le vent que les Inuits en ont pour la neige.

Enfin, j'ai atterri dans un bar à vins, chez le Père Louis, un minuscule estaminet établi en 1889 et qui n'a assurément pas changé depuis, où il n'y a que cinq tabourets (ne me demandez pas pourquoi; on pourrait en mettre au moins 15). Patrick, le patron, va du bar (où il boit café sur café) à la cuisine (où il prépare des assiettes de confit d'oie et de jambon cru); Hélène, sa complice, sert le vin ou le quinquina maison (vin apéritif fait d'une écorce amère aux propriétés toniques et fébrifuges fournie par diverses espèces d'arbustes du genre cinchona – merci Petit Robert) dans des coupes grandes comme des dés à coudre, remplies à ras bord. J'ai dit en rigolant que c'est pour que, si le client en renverse en portant le verre à sa bouche, il comprenne qu'il a assez bu. Le patron m'a dit: «Non, c'est qu'il faut hurluper.» Hurluper, c'est boire à même le verre, comme la vache à l'abreuvoir.
Décidément, j'aurai pris de bonnes manières.

dimanche 3 octobre 2010

Toulouse

Me voici à Toulouse pour une semaine, à la faveur de la défection d'un collègue, qui a préféré s'en aller travailler pour un autre organe d'information.
Comme je le comprends! Si vous saviez la galère qu'il s'était prévue! Un périple gastronomique au pays du cassoulet et du foie gras, vous vous rendez compte? Mais voyant le désarroi de la responsable du cahier Vacances Voyage, j'ai vaillamment offert de me sacrifier pour le remplacer au pied levé. L'honneur de La Presse est sauf!
J'ai donc commencé fort, très fort: en ce radieux dimanche d'octobre, fraîchement débarquée de l'avion, après avoir titubé comme une zombie pendant une heure au marché Saint-Aubin (fruits, légumes, volailles vivantes, livres d'occasion, vêtements faits en Turquie, épices, fleurs, cochonnailles, name it), j'ai pris la direction du restaurant Le Bon Vivre (rappelez-vous qu'il n'était pour moi que 7h du matin) et je me suis envoyé mon premier cassoulet. Hop. Cuisse de canard, saucisse, couenne de porc, haricots tarbais, avec un verre de rouge pour faire descendre.
C'était bien bon. Mais, à ce rythme-là, je ne tiendrai pas longtemps. Aussi me suis-je empressée de rentrer à l'hôtel pour une sieste aussi digestive que réparatrice. Tout à l'heure, après une promenade dans les vieilles rues de la Ville rose, je me contenterai d'une petite salade... et d'un tournedos Rossini, tenez.

Je loge dans un nouvel hôtel très français, ça s'appelle The Lofts. Sans blague. J'ai un studio avec mezzanine au 18e étage d'un immeuble assez laid, très très très moderne et design et tout. Ne le dites pas à la responsable de l'office du tourisme, mais j'aurais préféré un petit vieil hôtel un peu borgne tenu par un couple âgé qui aurait eu cet asseng tellemeng charmang. Vrai, au resto, ce midi, j'écoutais une dame à côté de moi, on aurait juré Clairetteu (les plus jeunes, faites-vous expliquer par un ancêtre de mon âge). Enfin, on ne va pas cracher dans la soupe, la vue sur Toulouse est splendide, même qu'il paraît que, par temps clair, on peut voir les Pyrénées.
Demain, rendez-vous avec la responsable de l'Office du tourisme, visite de la ville, bouffe, sieste, re-bouffe. Comme ça pendant une semaine.
La galère, vous dis-je.

vendredi 20 août 2010

Vu de la gloriette

De la gloriette où les propriétaires du camping ont eu la bonne idée d'installer un routeur, j'observe les pêcheurs de palourdes revenir de leur cueillette à mesure que la mer reprend ses droits dans la baie, qui se vide presque entièrement à marée basse.
Nous avons bien tenté tout à l'heure, Pierre et moi, de réitérer notre pêche miraculeuse du mois dernier, mais les surf clams que nous avions ramassées à plein panier l'autre fois se sont faites plus rares, Neptune seul sait pourquoi. Nous en aurons tout de même assez pour des spaghettis vongole ce soir: vin blanc, ail, palourdes, crème, pâte de tomate. Je pense que je cuisine encore plus en camping qu'à la maison, allez y comprendre quelque chose.
L'autre soir, nous avons poussé une pointe jusqu'à Freeport, paradis du shopping. On y trouve plus de magasins que d'habitations, plus de magasineurs que d'habitants et, en fin de compte, pas tant d'aubaines que ça, sauf pour les hommes. Nous-la-femme, apparemment, ne regardons pas à la dépense quand quelque chose nous plaît... Soit je n'ai rien vu qui me plaise, soit je ne suis pas une vraie femme: je n'ai (presque) rien acheté.
Nous avons terminé la journée dans un pub de la jolie ville de Brunswick, où l'on nous a servi un steak de brontosaure que nous avions eu la bonne idée de demander à partager. Songez donc: 14 onces de viande! Et la serveuse nous a dit que bien des gens eat the whole thing! Ces Américains me surprendront toujours.
Hier, la plage de Popham était complètement dissimulée sous un épais brouillard, le coup d'œil était proprement surréaliste. Les pauvres lifeguards n'y voyaient goutte, ça complique drôlement les opérations de surveillance et de sauvetage!
À la fin de la journée, nous nous sommes fait livrer du homard au camping (jusqu'à notre tente s'il vous plaît) par le pêcheur en personne, une sorte de colosse à la voix de baryton, venu avec sa femme. Depuis qu'il a fait un infarctus, c'est elle qui relève les 300 cages qu'ils mettent à l'eau, beau temps, mauvais temps. Quel courage, quand même.
Et puis nous voyons Eric, le propriétaire du camping, toujours en train de réparer ceci ou cela, d'installer un machin, de déplacer un truc, quand il n'est pas lui-même à la pêche aux coques. Il est tout seul pour tout faire et travaille du matin au soir pendant que sa femme s'occupe du téléphone. C'est de l'argent bien gagné!
Bon, c'est pas tout ça, faut encore aller arranger les palourdes. En buvant une bière, ça passera mieux.
J'espère que les moustiques nous ficheront la paix.

samedi 14 août 2010

Demain la mer

http://commondatastorage.googleapis.com/static.panoramio.com/photos/original/1690857.jpg Bon, ce n'est ni très loin ni très exotique, même pas vraiment dépaysant. Encore que...

Même le Maine, que tout le monde semble si bien connaître, recèle des coins secrets, fréquentés par les locaux seulement, et on peut là comme ailleurs se sentir en voyage. C'est-à-dire fréquenter d'autres lieux, d'autres gens, qui nous apporteront quelque chose de nouveau.

J'ai trouvé cet endroit il y a des années, au cours de vacances au New Hampshire pendant lesquelles j'avais, avec mon habituel sens de l'à-propos, emporté à lire L'Hôtel New Hampshire, de John Irving, un de mes auteurs fétiches.

Il situait le premier hôtel du nom quelque part à l'embouchure de la rivière Kennebec, bizarrement dans le Maine. Pas pu m'empêcher de regarder où ça se trouvait sur la carte. Tiens, ai-je dit à Yves, le père de mon fils et toujours mon meilleur ami, allons donc voir ce qu'il y a là. Nous nous y sommes rendus dare-dare sur notre Honda Nighthawk 450 (chose que je ne referai plus jamais de ma vie, juré-craché, c'est trop dangereux).

La rivière Kennebec se jette bien dans l'Atlantique, mais elle fait mille caprices, se divise en bras infinis où l'on se perd sans cesse entre terre et mer, pointes et baies, îles et marais... Nous avons abouti à Popham Beach, l'un des plus beaux endroits qu'il nous ait été donné de voir. Là, aucun hôtel digne de ce nom, à peine un guest house de cinq ou six chambres (parfait pour nous), un casse-croûte où l'on servait le meilleur shortcake à la rhubarbe au monde, et un camping tenu par un franco-américain qui n'avait plus de franco que le nom mais qui était très fier de nous accueillir comme ses presque-cousins.

Nous sommes tombés amoureux de la région, de ses gens simples, de sa beauté sauvage, de sa reposante modestie. Ici, pas de factory outlets, de boardwalks, de manèges, de salt water taffy... Les gens vivent et travaillent à Bath, au chantier maritime ou ailleurs, ont peut-être une roulotte installée à demeure quelque part dans un camping bon marché, se connaissent entre eux et vous reconnaissent comme étranger, vous accueillent et vous adoptent sans façon, comme les Américains savent faire, ce que nous, Québécois malades d'antiaméricanisme, avons trop tendance à oublier.

Nous y sommes retournés plusieurs fois par la suite, toujours en camping, et en sommes toujours revenus enchantés.

J'y vais demain avec mon Pierre, après un week-end exploratoire en juillet où nous avons rencontré un couple de Franco-Américains avec qui nous avons rigolé comme des bossus. C'est fou, mais j'ai presque aussi hâte de revoir Gerry et Pauline que de revoir la mer, de ramasser des palourdes et de me geler dans les vagues.

Photos à venir...

mercredi 9 juin 2010

Encore une fois Kipawa

Logistique, quand tu nous tiens...
Nous partons vendredi dès l'aube (du moins dans mes rêves) avec mon fils, mon amoureux et sa fille,  visiter le père de mon fils (comprenne qui pourra). Je nous souhaite assez de beau temps pour profiter du lac et de la vie.
Jules conduira, c'est un bon départ.

Quatre jours à la Barbade

On dira ce qu'on voudra,  ce métier est un esclavage.

J'ai dû me taper six heures d'avion pour un reportage de quatre jours à la Barbade. Depuis, c'est un feu roulant d'activités dans une chaleur de sauna: visite d'hôtel, souper ici, dîner là, excursion en catamaran, tours de ville... Il est temps que ça finisse.

Vendredi soir, donc, souper à Oistins Fish Fry, une succession de bouibouis où l'on sert, comme le nom du lieu l'indique, du poisson frit mais aussi grillé, selon l'humeur du client, et du poulet pour les fines bouches. Sur des tables de pique-nique simplement tendues d'une toile cirée, on vous sert dans une assiette de mélamine votre poisson volant grillé sur lit de rice and beans, que vous aurez bien sûr choisi d'arroser d'une bonne Banks (bière nationale) bien froide.

Dans l'air saturé de la fumée des barbecues, le son du reggae et de la calypso émane de guinguettes à peine éclairées où l'on distingue des couples qui s'agitent malgré la chaleur. Ce soir-là, sur une place qui n'allait sans doute pas tarder à s'emplir de monde, un grand Noir à dreadlocks dansait quelque chose d'absolument explicite avec une touriste blanche et blonde qu'il tenait fermement par les fesses. Elle se croyait probablement bien cool, mais elle était seulement ridicule, ce que prouvait l'hilarité égrillarde de quelques mâles locaux qui observaient la scène en se donnant des coups de coude.

Samedi, excursion en catamaran sur une mer étale mais, hélas, un peu trouble pour le tuba. Que voulez-vous, rien n'est parfait...  En revanche, à la deuxième étape, surprise: les tortues marines, attirées par le poisson que leur jettent les deux guides, arrivent en escadron et nagent au milieu de la soupe humaine que nous formons. Quel spectacle! Je n'en suis pas encore revenue.

Autre curiosité zoologique: il y avait là une fille qui hurlait comme une brûlée vive parce qu'un poisson ou une tortue l'avait frôlée. Heille, Chose, t'avais qu'à rester à la maison, franchement... Elle m'a fait honte, pour tout dire.

C'est quand même d'ouvrage, être une femme...

samedi 8 mai 2010

Le dernier dimanche + épilogue

Je suis rentrée depuis presque une semaine, mais il me reste à raconter mon dernier dimanche à Mexico. Aussi bien, je dis que je suis rentrée, mais mon cœur est encore là-bas! J'écoute de la musique de mariachis, j'achète des jalapenos, je regarde mes photos en soupirant et je viens de défaire ma valise, abandonnée depuis lundi grande ouverte sur le plancher de ma chambre, son contenu pêle-mêle tout autour (je ne sais pas pourquoi je déteste autant défaire une valise).

Dimanche matin, donc, je file à Xochimilco (enfin, «filer», façon de parler: il faut bien une heure pour s'y rendre, en métro et en tren ligero). C'est un village maraîcher un peu au sud de la grande ville, où je voulais voir les canaux, souvenir de la vie lacustre qui animait Mexico au temps des Aztèques. Les lancheros (bateliers), qui ont vite fait de repérer la rare étrangère que je suis (Xochimilco est surtout fréquenté par les locaux, qui viennent le dimanche s'y amuser en famille ou entre amis), me proposent un tour privé, mais je me vois mal seule comme une gringa dans ces barques faites pour faire la fête. Je veux une colectiva!
«Mira (regarde), me dit l'un d'eux, les colectivas te prennent 100 pesos. Moi, pour 50 de plus, je te fais tout voir et on arrête partout où tu veux. » Non merci, je veux une colectiva, bon! J'ai fini par trouver le bon embarcadère, le tour coûtait 15 malheureux pesos (ah, mais le filou!), j'étais avec plusieurs couples ou petites familles assez tranquilles mais sympa.
Ai-je bien fait! À un moment, nous avons croisé une barque dans laquelle se trouvait un gringo seul avec son batelier, sa Corona et ses tacos. Et tous mes compagnons de s'apitoyer joyeusement:  «Ma qué, pobrecito! Qu'est-ce qui est arrivé aux autres? Ils sont tous tombés à l'eau? Hon! Si c'est pas malheureux!»
Vrai, il faisait presque pitié...
En général, des familles entières (10, 15, 20 personnes) louent une barque, voire plusieurs qu'elles amarrent en caravane. Elles apportent le pique-nique, la bière, la tequila et passent la journée là, dans une ambiance de kermesse dont les Mexicains, décidément, ont le secret. Les lanchas multicolores se bousculent sur les canaux dans ce qui finit par ressembler à une version aquatique des autos tamponneuses (et ce n'est pas qu'une figure de style, les barques s'entrechoquent vraiment!). Ça rigole, ça s'interpelle, les mariachis poussent la chansonnette dans leurs propres lanchas qu'ils amarrent à celles des clients; les barques des marchands de fleurs, de peluches, de ballons et, évidemment, de nourriture zigzaguent à travers tout cela, bref, il règne là un joyeux chaos. J'aurais donc aimé que mon amoureux soit avec moi!

Et dimanche soir, je me suis offert le spectacle du Ballet folklorico de Mexico. Ça m'a rappelé mes jeunes années, à l'époque où j'étais danseuse étoile des célèbres Farandoles de Chicouticou (bon, pas étoile, d'accord), et où nous nous piquions de danse internationale (y compris quelques numéros mexicains).
En tout cas, le spectacle a duré deux heures bien comptées, dans une orgie de robes à froufrous et de frappers de talons, avec une douzaine de musiciens sur scène. Un régal! J'ai trouvé le public bien sage, moi qui aurais tant aimé lancer quelques-uns de ces retentissants  ayayayayaaaaaaayyyy dont j'ai le secret... Mais j'ai eu peur qu'on me mette à la porte, alors je me suis tenue coite.
Je suis rentrée en bus avec mon voisin de strapontin, un charmant médecin britannique venu là en congrès. Nous avons traversé à pied le parc de l'Alameda, où fourmillaient les petites gargotes ambulantes, et je n'ai pu résister à l'envie de m'offrir une dernière paire de tacos, que j'ai dégustés assise sur un muret de pierre. Mon compagnon m'a trouvée bien aventureuse de consommer ainsi de la nourriture de rue, lui qui couchait au Holiday Inn et qui ne voyage qu'en tours guidés... Chacun ses goûts, hein?

Lundi, histoire de m'offrir un dernier bain de Mexico, j'avais résolu de me rendre à l'aéroport en métro. C'est quand même quelque chose, cet aéroport en pleine ville! J'avais soigneusement planifié mon itinéraire pour limiter les changements de ligne, une vraie corvée dans ce réseau qui semble avoir poussé n'importe comment: il faut monter des escaliers, redescendre, remonter, et tourne ici, et va par là... À côté de ça, changer de ligne à Berri-UQAM est un plaisir. C'est dire.
Ça fait que monte, descends (escaliers mécaniques? connais pas), marche et marche, je suis arrivée à l'aéroport au bout d'une heure (une heure!) de transbordements. J'ai eu une bonne pensée pour l'inventeur de la valise à roulettes. Je n'ose imaginer de quoi j'aurais eu l'air si j'avais dû porter un sac à dos, moi qui suis arrivée en nage... au mauvais terminal (évidemment).

L'aéroport de Mexico est fait de deux terminaux. En principe, le numéro 1 est réservé aux vols intérieurs, le numéro 2 aux vols internationaux. Mais ce n'est qu'un principe puisque Air Canada et une poignée de sociétés américaines ont leurs comptoirs au numéro 1. Ce que sachant, c'est là que je me suis dirigée.
Là, pas de trace de Delta. Je m'informe à un agent, il me dit de monter à l'étage et de me rendre jusqu'au bout du corridor (interminable). Au bout du corridor (vraiment très long), pas de Delta. Je m'informe à une agente, elle me dit qu'il faut aller au terminal no 2, donc prendre la navette, au rez-de-chaussée, au bout du $@!&£€∞ corridor!

Heureusement, j'avais du temps...

Alors bon, me revoici dans mes pénates, avec mes chats et une jeune Française qui passera le mois de mai chez moi. Après, j'aurai peut-être la visite d'un jeune couple d'Indiens qui vienne d'immigrer au Canada, et peut-être aussi de mon ami Larbi du Maroc. Ce sera une autre façon de voyager... en attendant le prochain départ.

samedi 1 mai 2010

Bruits (2)

Aux bruits de Mexico, ajoutons, en ce samedi matin:

L'ahurissante pulsation de la musique techno d'une discothèque, quelque part dans la rue voisine, qui m'a tenue éveillée jusqu'à quatre heures du matin, et qu'aucun bouchon d'oreilles, eût-il été inventé par la NASA, n'aurait su étouffer. Je sais maintenant tout sur les méthodes du DG pour maintenir l'attention de ses auditeurs (ils sont sûrement tous sourds, il faut donc varier l'intensité des vibrations).

La grosse caisse qui, à huit heures ce matin, annonçait le début des manifestations du 1er mai, lesquelles passent toutes par l'autre rue voisine (laquelle mène directement au Zócalo), et qui n'ont pas cessé depuis. Un flot compact et ininterrompu de manifestants déferle vers la grande place, où j'irai jeter un œil tout à l'heure (dès qu'il sera ouvert).
Ils doivent dépasser le million, armés de mégaphones, de sifflets, de tambours, de trompettes, de drapeaux et de bannières. De temps en temps, un camion publicitaire hérissé de haut-parleurs s'insère dans le cortège et ajoute ses annonces à cette cacophonie invraisemblable.

Quand j'aurai pris la mesure de l'ampleur de cette marée humaine, j'irai me reposer à Xochimilco, où vit et prospère depuis l'empire aztèque toute une population de maraîchers qui alimentent la mégapole en fruits et en fleurs. Il y a paraît-il des canaux, des barques colorées et des champs fleuris qui sont à leur plus beau en ce moment même.

Ça me changera!

vendredi 30 avril 2010

Bruits

Au moment où j'écris ceci: Dans le café où je me trouve, à l'heure de la fermeture, le bruit du rideau de fer qu'on déroule. Celui de la télé où joue à tue-tête une telenovela qui a dû coûter très cher de larmes artificielles. Celui du moulin et de la machine à café, de la clim, des ustensiles qu'une serveuse secoue vigoureusement dans un seau de plastique pour je ne sais quelle raison obscure, des voitures qui passent dans la rue, des conversations des gens qui ne sont pas en train de surfer. Le cliquetis des claviers sur lesquels il faut piocher comme des sourds pour en tirer quelque chose, le choc de la vaisselle qu'on ramasse parce que le resto est sur le point de fermer (ce dont personne  ne semble se formaliser), le bip bip de la caisse qui additionne les additions.

La nuit, dans la ruelle autrement tranquille de mon hôtel: Des étudiants qui chantent l'hymne national après avoir fait honneur à la boisson nationale. Le raclement des poubelles d'acier que traînent sur le trottoir les employés du buffet chinois du rez-de-chaussée, et la musique qui les accompagne. Les conversations des gens de l'immeuble d'en face, qui veillent sur le toit.

Le matin: le chuintement des balais sur les trottoirs qu'on lave à grande eau savonneuse (à chaque commerçant son bout de trottoir). Les bus, les voitures, les motos, les zillions de taxis qui klaxonnent pour se signaler aux clients, le sifflet des agents de circulation. Les rideaux de fer qu'on remonte.


Le reste du jour: tout cela en même temps, plus le boniment du clown au Parque Alemada Central, qui m'apostrophe au moment où je passe devant lui: ¡Holà, señorita! Hao ale you? Waile ale you flom? Canada? Qué bonito!
Il y a toute une assistance hilare. Je lui dis qu'il peut me parler en espagnol, il me demande mon nom, et me voici engagée comme clownette de service. Il va me faire une sculpture en ballon, et il en profite pour commettre quelques calembours à connotation sexuelle dont les Mexicains raffolent. Au lieu de me demander quelle couleur je préfère, il me demande: «¿Qué sabor?» Je choisis rose. Il me demande si je les aime grosses ou longues. Je réponds que l'important, c'est ce qu'on fait avec. Il rigole. Il commence, ça a l'air absolument de ce qu'on pense qu'il va faire. Je me marre, il me dit que j'ai l'esprit mal tourné, tout le monde dans l'assistance se tord de rire. Il finit par me fabriquer un très innocent et très joli cygne rose, que je remets gracieusement à un jeune homme derrière moi, puisque je m'en vais faire des courses et que je n'ai absolument pas l'intention de traîner ça au mercado d'artesania.
Bruit des applaudissements.
La clim vient de s'éteindre, je suis la dernière cliente, on passe la serpillère derrière moi. Je rentre.

De retour à Mexico!

C'est quand même curieux: je suis rentrée à Mexico, après six heures de route, avec le sentiment de regagner une sorte de havre de paix, comme disent les dépliants touristiques. Six heures de route pour parcourir un peu moins de 300 km, mais quels paysages! Des orangeraies à perte de vue, des plantations d'agaves ponctuées de stands de pulque (un alcool fermenté fait à partir de la sève de l'agave, dont je ne désespère pas de trouver une version embouteillée), des vallées spectaculaires...
En arrivant en ville, j'ai trouvé les rues avenantes, les gens beaux, le climat confortable, la lumière splendide - bref, vive Mexico! Qui plus est, le Zócalo est quasi débarrassé de la hideuse structure qui abritait l'expo Mexico en tus sentidos, qui a pris fin la semaine dernière. On peut donc en admirer presque sans obstacle l'immensité et l'harmonie.
Le seul hic, c'est que je n'ai pu obtenir une chambre dans l'auberge internationale que je convoitais. Je loge dans un hôtel très correct qui me coûte trois fois rien (200 pesos, soit environ 16$), mais ça fait que je passerai vraisemblablement le week-end seule avec moi-même. Or, je trouve que je commence à manquer de conversation. Mais bon, il y a pire après l'enfer de Tuxpam (!!). L'autre truc, c'est que mes voies respiratoires me signalent avec insistance que la pollution à Mexico n'est pas une vue de l'esprit. Mais encore là, il y a pire...
Aujourd'hui, dernière tentative pour obtenir une chambre à l'Hostal Mexico City, puis direction Museo Bellas Artes pour acheter un billet pour le ballet folklorique de Mexico. J'irai ennsuite flemmarder au marché d'artisanat pour flamber quelques pesos supplémentaires. Je voudrais bien finir la journée au parc Garibaldi, repaire des mariachis, mais on dit que c'est un quartier un peu glauque. Comme femme seule, il y a quand même des trucs à éviter... Mais j'irai peut-être avant la nuit.

jeudi 29 avril 2010

Ah, et puis zut!

Quand j'ai écrit hier que le calme est une notion toute relative au Mexique, je ne croyais pas si bien dire. J'imaginais Tuxpam comme une paisible bourgade assoupie au bord d'un fleuve paresseux; je me voyais flâner au bord de l'eau, m'arrêter casser la croûte chez un marchand de tacos ambulant, lire ou observer les gens sous les arbres du Parque Central, filer passer une journée à la plage... Pfff!
Dites-vous bien une chose: si les guides de voyage ne parlent pas d'un lieu, c'est qu'il n'en vaut généralement pas la peine. Ni le Routard ni le Michelin n'avaient évoqué le moindrement Tuxpam. Mais le Let's go, lui, en faisait une description dithyrambique. J'en déduis que a) soit la ville a beaucoup, beaucoup changé depuis que le guide a été publié ou b) soit ses rédacteurs en fument du vraiment bon (Acapulco Gold?). Je penche pour la seconde option.
Forte de la recommandation de ce guide, je me suis dirigée vers l'hôtel La Parroquia. Vue sur le fleuve, pas cher, propre... Hum. Vue sur le fleuve, certes. Mais aussi sur le boulevard à quatre voies qui le longe. On aurait voulu attenter à ma santé mentale, on n'aurait pas fait autrement. Une ampoule fluo brillait de tous ses feux droit dans ma fenêtre, et le bruit de la circulation m'empêchait même d'entendre le son du vieux James Bond qui passait à la télé (avec Sean Connery, en anglais British sous-titré en espagnol, tout un exercice intellectuel, vous saurez). Mais c'est Guantanamó, ici! me suis-je dit (heureusement, Pierre m'avait laissé des bouchons pour les oreilles – merci, merci! –, ce dont Omar Khadr, le pauvre, n'a jamais bénéficié).
Du reste, ce n'est peut-être pas un hasard. Paraît que le Che et Fidel se sont réfugiés ici même, à Tuxpam, dans les années 50. Il y a d'ailleurs un musée à ce sujet quelque part de l'autre côté du fleuve. Mais je n'irai pas. Malgré la gentillesse de la dame qui tient l'hôtel, qui m'a vanté les mérites de la plage, de sa ville et de son carnaval qui a lieu en fin de semaine (imaginez le TAPAGE!!!), je file à Mexico illico. Tant qu'à entendre des voitures et des klaxons, autant que ce soit pour quelque chose.
J'y serai, ojalá, dans six petites heures.

mercredi 28 avril 2010

Papantla

Me voici à Papantla, où je suis venue essentiellement pour voir les ruines d'El Tajín, dont on dit qu'elles sont les plus vastes et les mieux conservées du pays. C'est sûrement vrai, et c'est assurément très beau, mais ce que je voulais surtout voir, ce sont les voladores, ces acrobates avant la lettre, qui descendent d'un mât de 30 m en tournoyant, attachés par la taille à une corde qui se déroule lentement et les amène jusqu'au sol. J'ai bien cru que je serais victime encore une fois de mon sens du timing (assez approximatif jusqu'ici), mais comme je descendais du camión (ainsi qu'on appelle les bus locaux), j'ai entendu l'air de flûte que joue le chef des voladores, perché au sommet du mât sur une minuscule plateforme circulaire que les Mohawks, qu'il paraît qu'ils n'ont pas le vertige, ils en seraient jaloux!
Quel spectacle! Pas aussi extrême que je l'aurais cru, mais gracieux, touchant, émouvant, surtout lorsqu'on songe que ce rituel existe depuis des siècles.
Après ma visite des ruines, que j'ai écourtée parce que l'orage menaçait, je suis rentrée tout à l'heure en ville et je suis allée m'asseoir au comptoir d'une taqueria, au marché. Le type qui faisait les tacos travaillait tellement vite, on aurait cru un film en accéléré! Mais le plus beau de l'affaire, c'est qu'il a pris le temps de me faire la causette en toute tranquillité et en rigolant avec les autres taqueros des comptoirs voisins: «Ah, vous avez vu, la Canadienne, c'est chez nous qu'elle est venue!»
Le taquero d'en face me faisait des mines désolées, tout le monde me regardait avec un air de gentille curiosité, notamment, m'a-t-il semblé, pour voir si j'allais m'étouffer avec la salsa roja. Mais j'ai fait pas mal de progrès depuis la Thaïlande, héhéhé!
En tout cas, 22 pesos (c'est-à-dire environ 1,70$) pour ces quatre succulents tacos et un Coca, surtout servis dans ce contexte, c'est franchement donné!
Je pars en fin d'après-midi pour Tuxpan, où je compte ne pas faire grand-chose sauf manger et me promener le long de l'eau, histoire de faire des réserves de calme avant de retourner à Mexico.
Mais le calme ici est une notion hautement relative, même dans les villages les plus reculés. Il y a toujours du bruit partout: klaxons, moteurs exténués des camiones, sifflet des agents de circulation, musique qui joue à tue-tête dans les autos, les boutiques et les restos, télé qui tonitrue, ventilos ou climatiseurs hors d'âge, carillon de la cathédrale... Une symphonie inachevable!

lundi 26 avril 2010

Xalapa

Mon amoureux est reparti hier matin pour la vraie vie, je suis donc seule pour la semaine et un peu déstabilisée. J'ai quitté Veracruz hier midi, il faisait une chaleur puante et étouffante, ce qui a largement influé sur mon choix de venir à Xalapa, capitale de l'État de Veracruz et ville universitaire qui abrite un musée ethnographique digne d'intérêt. J'avais lu que le climat y est frais et la vie culturelle assez riche. Vaya, me suis-je dit, je vais me faire des amis à l'auberge de jeunesse (qui, contrairement à son appellation, reçoit de plus en plus d'anciens jeunes comme moi, qui n'ont jamais cessé de les fréquenter) et j'irai au musée, puis à Coatepec, désigné pueblo magico par l'office du tourisme mexicain.

Mon sens du timing en a décidé autrement: le musée est fermé le lundi, et nous sommes exactement quatre clients à l'auberge de jeunesse, dont une jeune femme qui s'était mis en tête de s'exercer à la jonglerie sur la terrasse que surplombe ma fenêtre en écoutant de la musique comme une sourde dure d'oreille et malentendante. Les quilles de plastique tombaient toutes les 30 secondes sur le dallage (bong! boboing boing!!!)... Comme il était quand même 22h et que j'avais vraiment envie de dormir, je suis allée lui demander gentiment de bien vouloir bajar la música. Elle m'a regardée à travers ses dreadlocks comme si j'étais un caca de chien collé sous ses sandales indiennes. Je l'aurais grémie, comme disait ma mère, mais je me suis retenue. D'autant plus qu'elle a quand même obtempéré pour ce qui est de la musique. Tout en continuant de laisser tomber ses &@#~!!@€!! quilles par terre (je pense que les dreadlocks devant les yeux sont rédhibitoires).

Aujourd'hui, donc, journée à ne pas faire grand-chose. Xalapa n'est pas particulièrement jolie mais cache quelques coins assez sympa, comme un lavoir du XVIe siècle dans un square plein de fontaines ruisselantes et d'abreuvoirs destinés aux mulets des paysans qui venaient autrefois vendre leurs produits en ville. Les rues sont pentues, cabossées, tortueuses, dallées d'énormes pierres noires, et l'artère principale est bordée d'immeubles républicains assez pompeux. Demain, musée, et peut-être cap sur Papantla, près des ruines d'El Tajín, à quatre heures et demie de bus.

samedi 24 avril 2010

Vamos a la playa (bis)

Hier, prise d'une folle témérité, j'ai proposé à Pierre de reprendre une pirata pour aller voir Sontecomapan, bourgade nichée au bord d'une lagune à une petite demi-heure de Catemaco. Il y a là, avais-je lu, de jolies mangroves, peut-être la possibilité de faire un tour de barque et même d'aller à la plage.
Chose dite, chose faite, nous revoilà dans la boîte d'un pick-up, le nez au vent comme de jeunes chiens, humant de riches odeurs végétales (on aurait dit que quelqu'un avait renversé une bouteille de shampoing Herbal Essence!), parmi les frangipaniers, les hibiscus, les pothos géants et les pâturages d'un vert éblouissant.

Arrivés à Sontecomapan, les lancheros nous ont tour à tour abordés pour nous offrir de nous emmener en barque voir la mangrove (c'est la basse saison, les affaires sont calmes et la concurrence est féroce).
Un large panneau annonçait les tarifs des colectivos (bateaux-taxis collectifs), dont l'un allait à La Barra, une plage à l'embouchure de la lagune dont une dame nous avait dit la veille le plus grand bien. Nous avons sauté dans celui qui partait à l'instant (40 pesos par tête, soit environ 3,50$), pour parcourir un époustouflant couloir aquatique bordé de palétuviers, de lotus et de lentilles d'eau jusqu'à la lagune elle-même, qui brille au milieu de collines qui ont dû être des volcans, puis jusqu'à La Barra, bande de sable où ont poussé quelques maisons, entre mer et lagune.
La journée que nous avons passée là! La plage, immense et quasi déserte, est baignée d'une eau claire comme du cristal, agitée de vagues qui bercent tout doucement une écume phosphorescente. Nous étions les seuls touristes étrangers. Encore un lieu, nous sommes-nous dit, qui n'échappera pas longtemps à la cupidité des promoteurs. Profitons-en pendant qu'il en est encore temps!
Une vieille dame avait installé un étal où elle écaillait de toutes petites huîtres très fraîches et très douces, qu'elle servait accompagnées de sel, de citron vert et de l'incontournable chile.

Une autre femme, avec sont petit garçon tout édenté, vendait des mangues piquées sur un bâtonnet et arrangées en forme de fleur, encore là arrosées de citron, de sel... et de chile, bien sûr. Un homme offrait des tegogoles, petits escargots que l'on pêche dans le lac de Catemaco, servis avec devinez quoi. On n'en a pas voulu (je me méfie depuis mon expérience au Maroc), bien que le vendeur nous ait assuré que ça avait des vertus aphrodisiaques. Mon amoureux n'a pas besoin de ça, j'ai dit en rigolant. Il nous a souri de toutes ses dents en argent et nous a gentiment salués: Que les vayan bien!
Puis une très belle jeune femme du nom d'Elena m'a offert de lire dans les lignes de ma main. Elle ma promis une longue et bonne vie pleine d'amour et de prospérité, m'a conseillé de me méfier de deux personnes, un homme et une femme, qui se disent mes amis mais qui en réalité m'envient mon bonheur (qui que vous soyez, je ne vous en veux pas, c'est vrai que je suis bénie!), et elle m'a dit quoi faire pour enfin cesser de rêver à ma mère, morte depuis 34 ans. Tout ça pour 20 pesos. Si son truc marche, je lui en envoie 100 de mieux!
Voilà. Maintenant, nous rentrons à Veracruz, où mon amoureux prendra l'avion pour Mexico et de là pour Montréal, pendant que j'irai me la couler douce sur la Costa Esmeralda une petite semaine supplémentaire.

jeudi 22 avril 2010

Vamos a la playa!

Aujourd'hui, journée à la plage de Monte Pio. Deux heures de transport en pirata, un petit pick-up à cabine double dont la boîte est garnie de deux banquettes, où l'on peut apparemment entasser un nombre infini de personnes (normalement huit dans la boîte et cinq dans la cabine, plus le chauffeur).
Nous avons grimpé à l'arrière, histoire d'avoir plus d'air. Dur pour les fesses mais idéal pour apprécier le paysage de collines herbeuses, d'arbres gigantesques couverts de lianes, de bougainvilliers éclatants, avec la mer qui miroite au loin.
À la plage, une suite de gargotes dont le principal mérite est d'offrir un indispensable abri de palmes proposent toutes plus ou moins la même chose: poisson grillé, crevettes, langoustines, cerveza... Nous avons choisi celle dont les tables étaient le plus près de la mer et où les hamacs paraissaient en bon état. 
Étrange que personne ne connaisse cette région pourtant fabuleusement belle, me disais-je. Mais ça ne durera pas: le chauffeur de la pirata qui nous a ramenés à Catemaco (et qui passait par tous les bleds imaginables en cours de route) nous a expliqué que le gouvernement a le projet de construire une autoroute et de faire de la région un nouveau Cancun. Qué lástima!
Nous avons partagé les banquettes de la camionnette tour à tour avec une famille qui revenait d'acheter du poisson pour le vendre en ville, deux femmes et un homme avec leur récolte de feuilles pour cuire les tamales ainsi que plusieurs travailleurs agricoles, qui tous se sont montrés d'une exquise gentillesse, s'amusant de nos efforts pour parler espagnol, répondant à nos questions, en posant à leur tour...
Des gens simples, travailleurs, adorables.

mercredi 21 avril 2010

Périls de la jungle

Nous avons pris hier à midi le bus pour Catemaco. En fait, pour San Andres Tuxtla, d'où nous devions ensuite prendre une pirata (transport local en pick-up) jusqu'à Catemaco. Deux heures de route à travers un spectaculaire paysage de montagnes, de plantations, d'immenses prairies où des bœufs paissaient placidement.
À 12 kilomètres de San Andres, le bus a rendu l'âme: c'était la panne. Le chauffeur nous a annoncé qu'un autre bus allait venir nous prendre ahorita.
Évidemment, Pierre n'a pu s'empêcher d'aller écornifler un peu aux alentours, si bien que, quand le bus est arrivé, en effet quelques minutes plus tard, il était déjà hors de vue. Le temps que je le repère dans la foule des vendeurs ambulants et des écoliers qui sortaient de classe, que nous récupérions notre bagage dans la soute du premier car, le bus en question était parti. Bof, il y en avait un autre juste là devant et, ô surprise, celui-là se rendait jusqu'à Catemaco! Nous sommes donc montés dare-dare, et adelante! Un musicien est monté avec sa guitare et nous a poussé la chansonnette nordeña pendant que le bus bringuebalait sur une route défoncée. Dommage, impossible de prendre une photo, ça secouait trop.
Mais c'était hyper rigolo!
Catemaco n'est pas classé au patrimoine mondial. Ce n'est pas joli, c'est même assez funky, merci. Mais ça nous plaît pourtant infiniment plus que Tlacotalpán, peut-être justement parce que c'est moins léché, mais bien plus vivant.
À Catemaco, il n'y a rien. Rien qu'un lac splendide qui fait 17 km sur 19, des aigrettes neigeuses qui nichent par dizaines dans l'arbre devant notre hôtel, une jungle touffue que nous sommes allés voir ce matin en lancha (barque). Nous avons vu toutes les espèces possibles de hérons, des cormorans en quantité, des grandes aigrettes, des martins pêcheurs et même un crocodile, au moment précis où Gonzalo, notre guide, nous disait qu'il était fort rare qu'on en voie!
Il y a aussi une île où des chercheurs ont implanté une colonie de macaques de Thaïlande. Ils sont particulièrement laids (les singes, pas les chercheurs, quoique je ne les aie pas vus), avec des couilles aussi grosses et rouges que des pommes grenades. Nous ne nous sommes pas attardés, ce n'est pas la partie la plus intéressante de la visite, mettons...
Après cette épuisante excursion dans les profondeurs de la jungle mexicaine, nous avons remis à demain nos projets de jouer à Blue Lagoon. Surtout, ne pas trop se fatiguer. Justement, c'est l'heure de la sainte cerveza, que nous boirons à la santé de nos parents et amis, ces veinards qui échappent aux risques terribles que nous courons.

mardi 20 avril 2010

Voir Tlacotalpán et... euh...

Très joli. C'est un très joli village (environ 8000 habitants). Maisons d'un seul étage peintes de couleurs invraisemblables (on dirait des bonbons!) et couvertes d'antiques tuiles moussues, placettes dallées de marbre, bancs de fer forgé, trois églises très anciennes, très simples et très jolies (moi qui ne cesse de dire que je veux apostasier, c'est fou le nombre d'églises que j'ai visitées depuis que je suis au Mexique!). Je mettrai des photos plus tard parce que cet ordi va me rendre dingue, mais le coup d'oeil est fabuleux, avec la lagune qui traîne ses eaux paresseuses, la langue de terre de l'autre côté... 
Mais, aussi bien le dire, nous n'allons pas nous éterniser ici: en dehors de la fête de la Chandeleur (2 février), où on lâche des taureaux dans les rues et où tout le monde semble virer fou, il ne se passe pas grand-chose ici. Surtout un lundi soir! Nous avons vu l'heur de trouver un resto ouvert pour souper, et pareil pour le petit déjeuner. Nous partons tantôt pour un autre bled encore plus perdu, Catemaco, à deux heures d'ici, d'où nous comptons atteindre une plage où nous recréerons les inoubliables rôles de Brooke Shield et de je ne sais plus qui dans Le Lagon bleu.
M'en vais faire mon bagage.




dimanche 18 avril 2010

Veracruz

Samedi soir à Veracruz: muy caliente, je ne vous dis que ça!
Sur le Zòcalo, les musiciens se font la guerre: c'est à qui jouera le plus fort (et parfois le plus mal). Étourdis par tant d'effervescence, nous avons cherché un peu de calme sur une placette en retrait. Or, il y avait là un congrès de médecins, et pour l'occasion un orchestre installé sur une scène extérieure et des bailadores de danzon (une musique d'origine cubaine, mais en plus lent), les messieurs coiffés d'un panama blanc, les dames munies d'un éventail qu'elles agitent nonchalamment à un moment précis de la danse (mais nous n'avons pas vraiment compris lequel).

Nous avons invité une dame qui cherchait un siège à s'asseoir avec nous. Silvia Eugenia, adorable de gentillesse, nous a fait la causette toute la soirée, ne s'interrompant que pour accepter les invitations à danser d'un monsieur très élégant. Ce qu'ils étaient beaux à voir! Toute la place était occupée par les danseurs et par cette musique magique, lente, sensuelle à mort...
«Vous ne dansez pas? a demandé Silvia.
– C'est que, à côté de vous, nous nous sentons comme des éléphants», ai-je répondu en riant.
Je lui ai expliqué que, contrairement aux Veracruzanos, les Québécois qui veulent danser la salsa, le merengue et toutes ces choses, doivent APPRENDRE, suivre des cours, bref: travailler.
Elle n'en revenait pas!
Nous avons quand même risqué quelques pas après la première bouteille de vin, et Silvia a vite compris ce que je voulais dire.
Veracruz est une ville bruyante, décatie, désordonnée, presque affolante, mais l'air y est incroyablement doux (et parfois terriblement puant), les gens sourient, rigolent, il y a des enfants, des vendeurs ambulants et de la musique partout... J'adore!
* * *
Dimanche soir à Veracruz, toujours aussi caliente! À la fin d'un après-midi à la plage non loin de la ville (plage très correcte, contrairement à ce que prétendent nos guides Routard et Michelin), nous avons retrouvé Silvia sur la même placette que la veille. Tout endimanchée, toujours aussi pleine de joie de vivre, elle nous a conseillé un itinéraire pour le reste de la semaine, a abondamment dansé avec un autre monsieur très taciturne (photo), et nous nous sommes fixé rendez-vous dimanche soir, après le départ de Pierre pour Montréal via Mexico.
Après l'avoir quittée, nous nous apprêtions à rentrer à l'hôtel quand nous sommes passés devant un tout petit bar où jouait un groupe de salsa. Quand je dis qu'il y a de la musique partout, c'est qu'il y a VRAIMENT de la musique absolument PARTOUT. On ne pouvait pas rentrer comme ça, quand même! Nous nous sommes résignés à prendre un dernier verre et, la Modelo Oscura aidant, avons esquissé quelques pas de danse sous l'œil amusé des autres clients.

Là, maintenant, cap sur Tlecotalpan, village au bord d'une lagune, classé au patrimoine mondial de l'UNESCO. Je sens que je vais craquer!

vendredi 16 avril 2010

Puebla

Aujourd'hui, visite de trois églises plus baroques les unes que les autres. Des angelots coiffés de plumes qui descendent en cascades du plafond au plancher, des dorures, des volutes de stuc, des saints à la figure compassée en veux-tu en voilà, des Christs sanguinolents à l'air complètement consterné (j'ai commencé une collection), des Vierges en robe de dentelle et cape de velours, couronnées d'or et d'argent, des symboles païens à travers tout cela... On ne peut que s'émerveiller d'une telle profusion. Les Espagnols avaient de la main-d'œuvre en masse, ils en ont profité. On dit que, à Cholula, Cortes avait juré de construire 365 églises, une pour chaque jour de l'année. Heureusement qu'il s'est arrêté avant, on ne saurait plus où donner de la tête!
 Autrement, Puebla est une ville étrange, à la fois très touristique et extrêmement réservée, et sans doute la plus parisienne des villes mexicaines. Il y a au centre-ville un immeuble de style Eiffel, en acier, avec les boulons et tout, construit par une firme française, et un passage couvert dont la façade s'orne d'une splendide verrière art déco. Les façades des immeubles coloniaux sont couvertes d'azulejos (tuiles de céramique), c'est spectaculaire.
La grand-place bourdonne d'activité, ça grouille de monde, des Mexicains pour la plupart. Nous sommes toujours épatés par la quantité de bébés qu'il y a partout. Les parents les portent dans leurs bras comme un précieux colis (pas de poussettes ici, c'est impossible à manœuvrer!) et, dès que les petits savent marcher, ils trottinent placidement aux côtés de papa ou maman, ou d'un grand frère extraordinairement attentionné. La famille, ici, est une valeur cardinale qui n'est dépassée que par la piété, et encore.
Il paraît que Puebla est l'une des capitales gastronomiques du Mexique. Je ne sais trop qu'en penser. Nous n'avons pas encore eu notre baptême de mole poblano (sauce à base de cacao, d'amandes et d'épices diverses, que l'on sert sur du poulet), mais j'ai tenté avant-hier une expérience avec le pipián (sauce verte à base de graines de citrouille) qui s'est avérée fort décevante.
Heureusement, la soirée a été sauvée par un homme qui s'est amené au resto vers 20h et s'est installé au piano. Nous étions les seuls clients, nous avons noué conversation et fini par passer la soirée en sa compagnie. Il avait dans ses cahiers quantités de vieilles chansons françaises que je me suis fait un plaisir de lui transcrire phonétiquement pour qu'il puisse les chanter dans le texte. Je signale à mes collègues de La Presse que LUI, au moins, a su apprécier mon talent vocal, héhéhé!

En fin de compte, pour revenir à la cuisine, ma préférée est encore celle des rues: les généreuses quesadillas (celles d'aujourd'hui, farcies de fleurs de courgettes et d'un très bon fromage frais, étaient franchement exquises), la guacamole avec la bière de l'apéro, la sopa azteca (un bon potage tomaté garni d'avocat dans lequel, cela va sans dire, baignent des lanières de tortilla frite)...
On mange très bien pour trois fois rien dans ces petites gargotes, j'adore l'odeur des tortillas chaudes et je m'émerveille sans cesse de la quantité de façons qu'on a inventées pour les cuisiner afin qu'on n'ait pas l'impression de bouffer sempiternellement la même chose!

N'empêche, hier, nous avons dépensé l'équivalent de trois nuits d'hôtel (il faut dire que l'hôtel ne nous coûte vraiment, mais vraiment pas cher) dans un restaurant espagnol assez péteux, où nous avons dégusté une côte de bœuf grillée digne d'Obélix. Que voulez-vous, je n'ai aucun penchant pour le végétarisme, il me faut ma tranche de cadavre de temps en temps...

Demain, cap sur Cacaxtla (je n'arrive pas à prononcer ce mot), où il y a paraît-il des fresques préhispaniques admirablement conservées. Pierre y tient beaucoup. Pour ma part, je commence à être un peu saturée des déesses de la fertilité (grandes oreilles, grosses cuisses, bouche en cul de poule), je finis par trouver qu'elles se ressemblent toutes, mais bon. Les fresques de Cacaxtla sont apparemment éblouissantes, nous verrons bien.

Ensuite, direction Veracruz, pays du danzón et de la marimba... et enfin la mer! La Costa Esmeralda, plus précisément. J'espère qu'elle porte bien son nom...

mardi 13 avril 2010

Petite journée

Le lac de Pátzcuaro a déjà été l'un des plus beaux du Mexique, à ce qu'on dit (vrai, il n'y en a que trois ou quatre, mais bon). Cerclé de montagnes, émaillé de villages, serti de quatre îles elles-même toutes semées de maisons aux toits de tuiles rouges, il fait plusieurs kilomètres de longueur. Autrefois, dans des barques à la fragilité affolante, les pêcheurs capturaient au filet de petits poissons qui avaient fait la réputation de la gastronomie de la région.

Plus rien de cela n'existe. Le niveau du lac n'a cessé de baisser depuis 25 ans. Son eau, couleur café au lait, est envahie d'algues qui l'étouffent; les poissons sont en voie d'extinction, les pêcheurs ne capturent plus rien. Les villages, exsangues, offrent le triste spectacle de communautés qui dépendent quasi exclusivement du tourisme: les enfants courent après les gringos pour leur vendre de menues marchandises, les femmes offrent d'un air las des tissages et des poteries tous pareils... Nous avons passé la journée à visiter quelques villages, dont l'un où se trouvent quelques ruines purépechas (pyramides de pierre au milieu d'un vaste champ, quelques vestiges d'une vie agricole...). En fin de compte, nous avons négocié avec un jeune homme le prix d'un passage en lancha jusqu'à la plus grande des îles, que nous avons parcourue de part en part avec un sentiment grandissant de consternation. Nous avons repris un bateau pour regagner avec soulagement la douce animation de Pátzcuaro.

Demain, retour vers Morelia, puis direction Veracruz, sur la Costa Esmeralda, en passant peut-être par Taxco ou Puebla, nous verrons. En attendant, nous allons souper dans un de ces restos qui offrent à peu près tous les mêmes plats au menu, qui se révèlent immanquablement différents de ceux que l'on avait commandé la semaine d'avant et qui, pourtant, portaient le même nom. Je découvre des mots que mon dictionnaire ne contient pas, mais heureusement les Mexicains, toujours aussi affables et gentils, prennent le temps d'expliquer, de réexpliquer, de répéter...

lundi 12 avril 2010

Patzcuaro

Ce matin, après le petit déjeuner de pain grillé et de café de olla (parfumé à la cannelle), nous avons sauté dans un taxi. Nous souhaitions nous rendre au terminus de bus pour en prendre un de seconde classe vers Patzcuaro, à une heure de route, en principe. Le chauffeur nous a plutôt proposé de nous emmener à la sortie de la ville, où un taxi collectivo nous emmènerait droit au village en moins de temps et pour moins cher qu'un bus. Chose dite, chose faite.
Nous sommes donc arrivés à Patzcuaro, un village tellement vieux, tellement différent de tout ce que nous avons vu jusqu'ici qu'on pourrait se croire dans un tout autre pays. Ici, les maisons sont faites de pisé, le bas est peint en rouge sang-de-boeuf, le reste blanchi à la chaux, et les toits sont couverts de tuiles. Les gens ne sont pas riches, ça se voit clairement, mais tous nous saluent fort gentiment. La grande place est bordée de palais coloniaux plus jolis les uns que les autres, mais cela ne se devine pas de la rue. Il faut pousser les antiques portes cochères pour découvrir des jardins, des fontaines, des balcons, des chambres fraîches et ombragées qui contrastent avec les rues poussiéreuses et bruyantes où se pressent des vendeurs ambulants, des familles, de petites vieilles édentées et rabougries, des ados en uniforme scolaire, toute une vie qui grouille et palpite sans arrêt.
Nous logeons dans un charmant petit hôtel au patio tout fleuri, une chambre impeccable avec salle de bains privée qui nous coûte la fortune de 250 pesos pour deux, ce qui équivaut à environ 20$ canadiens. Il fait bien plus frais ici qu'à Morelia, la petite laine sera de rigueur ce soir pour la première fois depuis notre arrivée au Mexique. Tellement que, même pour l'heure de la Sainte Bière, sous les arcades de la place qui est dit-on la plus grande d'Amérique, il a fallu que je mette mon châle. La grosse misère, quoi...

samedi 10 avril 2010

Le rêve en couleur

Nous voici à Morelia, austère ville toute de pierre rosée, après deux jours à Guanajuato, où nous avons bien cru laisser notre coeur. Ces maisons aux couleurs vives, accrochées à flanc de colline comme la construction fantaisiste d'un enfant! Ces églises aux retables d'or, qui tiennent plus du délire religieux que de la simple foi... Et puis les sons de Guanajuato - le chuintement du balai sur les pavés qu'on lave tous les matins à grande eau savonneuse, le clocher qui sonne l'heure, le quart d'heure, la demie, les trois quarts (oui, bon, la nuit c'est un peu embêtant, mais moins que la meute de chiens qui se criaient des bêtises sans qu'on sache pourquoi), le coq qui pousse ses cocoricos (oui, bon, ca aussi, c'est un peu embêtant, mais bon, on est en vacances, on n'a qu'à se rendormir!)... 
Et puis il y a les callejoneadas, qui sont sans doute la chose au monde la plus charmante. Autrefois, il s'agissait d'étudiants qui, habillés à la mode espagnole du XIVe siècle, se mettaient à chanter dans les venelles de la ville (les callejones). Les gens les suivaient et cela créait une sorte de fête spontanée. 
Maintenant, les musiciens vendent des billets en prévision de la chose, ce qui lui enlève bien sûr son aspect improvisé, mais tout de même, il faut voir (et entendre) l'atmosphère que cela crée! Nous étions assis bien tranquillement dans un adorable parc (la ville en est pleine), à siroter le reste du vin que nous avions acheté pour souper, quand nous avons entendu cette rumeur de fête. Nous avons suivi le son... Surprise! Dans cette étroite venelle, au pied d'un vénérable portail, ils étaient bien une quinzaine de musiciens, et sûrement une centaine de spectateurs, à chanter en choeur un air traditionnel très gai, très patriotique... C'était magnifique!
Guanajuato est une toute petite ville (enfin, comparativement à Mexico, ou même à Querétaro). On passe son temps à tourner en rond dans ses venelles labyrinthiques, mais tout est si joli, si plein de bruits et d'odeurs et de surprises à chaque détour l'on n'a cure de revenir sans cesse à son point de départ.
Tout commence toujours au Jardín de la Union, ombragé par d'immenses figuiers taillés comme des moustaches de colonel. Là, à l'heure de l'apéro (enfin, de ce qui est normalement l'apéro pour nous, mais ici rien ne marche comme on en a l'habitude), les mariachis commencent à se rassembler sur les bancs de fer qui bordent la place, devant les terrasses des restaurants. Quand les consommateurs commencent à être assez ivres, les mariachis commencent leurs sollicitations: 150 pesos por una cansión, on serait bien malvenu de refuser, depuis tantôt qu'on profite de ce que les autres ont payé... Va por una cansión, bientôt suivie d'une autre, puis d'une autre encore. Mine de rien, mon amoureux a dépensé pour cinq chansons davantage que ce que nous coûtait une nuit d'hôtel, mais quand même, La Paloma chantée juste pour nous par huit beaux hommes habillés en toréadors, vestes brodées et pantalon ajusté, comme dit l'autre, ca n'a pas de prix... Nous avons même dansé quelques pas de valse, ou de je ne me souviens plus très bien quoi, mais enfin, c'était trop romantique.
Nous avons donc quitté Guanajuato hier soir apr}es avoir rêvé d'y acheter une maison póur faire posada (auberge) à la retraite. Je n'ai pas dit mon dernier mot.
Aujourd'hui, nous sommes donc à Morelia (environ 2 millions d'habitants), une ville complètement différente de Guanajuato, mais qui ne manque pas de charme non plus. On nous promet pour ce soir une fiesta muy grande sur la grande place, avec musique in vivo, danse et tout le toutim. En attendant, nous sommes allés traîner du côté du marché, où nous avons dégusté pour même pas le prix d'un Big Mac un caldo de camarones (soupe de crevettes) digne des plus grandes tables, arrosé de deux cervezas bien froides. Miam!
Voilà, demain, peut-être encore un peu de flâneries à Morelia (il y a bien encore quatre ou cinq églises que nous n'avons pas vues), puis cap sur Patzcuaro, un peu plus au sud, près d'un lac qui a dit-on déja été le plus beau du Mexique mais qui a paraît-il perdu bien du charme. Nous verrons. A ver, comme disent les Mexicains.

mardi 6 avril 2010

Beautés coloniales

Après la folie de Mexico, Querétaro nous a paru bien paisible. Nous y sommes parvenus après trois heures et demie de route dans un car ou jouait à tue-tête un film particulièrement criard avec Cameron Diaz (les Mexicains adorent le bruit). La ville compte plus ou moins un million d'habitants (nous avons cru comprendre que ça augmente très vite), mais on traverse le centre historique en une petite demi-heure. Ça, bien sûr, c'est si on s'empêche d'entrer dans les innombrables églises que l'on croise, et on aurait bien tort: on y trouve de délirants et immenses retables dorés à la feuille, des toiles anonymes dont l'imagerie sanglante m'étonnera toujours, des Christs naïfs étendus dans des chasses vitrées... et puis il y fait toujours frais, ce qui n'est pas de refus sous ce soleil de plomb!

C'est d'ailleurs à cause de cette chaleur qui devient écrasante vers 15h que nous avons adopté le rythme mexicain: petit-déjeuner vers 9h, repas consistant vers 14h, sieste jusqu'à 18h, promenade dans les rues piétonnes de la vieille ville et ses jolies placettes ombragées, souper léger plus tard en soirée. Cela, joint à l'architecture arabo-andalouse des maisons, nous ferait croire sans mal que nous sommes en Espagne. Mais les Mexicains ont une sorte de joie de vivre, de gentillesse intrinsèque, de spontanéité que l'on ne trouve peut-être pas chez les Espagnols.

Tout à l'heure, nous avons assisté à une procession religieuse, avec fanfare et pétards, en l'honneur de la sainte patronne de la province ou de la région, je ne sais trop. J'aurais cru que, Pâques étant tout juste passé, on aurait pris un petit moment de repos, mais Pierre croit qu'il faut vite relancer la business pour que ça ne s'essouffle pas. Rien n'est moins sûr: pendant que je pioche ces mots sur un clavier tout collé, j'écoute des airs de Noël à la sauce celtique. Ça ne s'invente pas!

Demain, direction Guanajuato, puis Patzcuaro, autres villes citées au patrimoine mondial de l'UNESCO. On va encore être obligés d'entrer dans plein d'églises et de musées et de palacios, de prendre des photos de maisons aux murs ocre ou roses aux balcons de fer forgé remplis de fleurs, de faire la sieste même si on n'est pas fatigués, pffff.

dimanche 4 avril 2010

Mégapole mégafolle


Nous y sommes donc. Arrivés vendredi soir assez exténués par le voyage, nous avons vite mis de côté nos velléités d'aller explorer la ville tout de go. Direction l'hôtel, la Casa Vieja, qui porte bien son nom. Caché dans une ruelle borgne de la Zona Rosa, il compte quatre dortoirs, plus deux chambres au confort spartiate aménagées dans des cubes de béton construits en ajout sur le toit. Tout est un peu de guinguois, mais propre. Et puis, du moment qu'aucune bestiole indésirable ne fait mine de vouloir partager notre lit...

Mexico, maintenant. Pfiou! Ça tonitrue, ça klaxonne, ça s'interpelle, ça mange constamment, ça n'arrête pas! Samedi, nous avons marché dans la vieille ville, visité quelques musées, sacrifié au rite de la sainte bière, comme il se doit, dans un estaminet inconnu des touristes et, bien sûr goûté à quelques spécialités du cru, notamment une tostada bleue couverte de frijoles, de cactus haché, de salsa et de fromage.

Le Palacio Nacional est une splendeur, et les fresques de Diego Rivera, dans le plus pur style réalisme soviétique, valent vraiment le coup d'oeil. Au centre du Zocalo, le gouvernement a dressé une structure assez laide, où l'on présente une expo de photos magnifiques de Willy Souza à l'occasion du 200e anniversaire de l'indépendance. C'était beau de voir les Mexicains regarder ces portraits d'eux-mêmes et des beautés de leur pays comme s'ils ne s'étaient jamais vus aussi beaux, riches d'une culture millénaire et d'une histoire tourmentée.

Le soir venu, il y avait une mer de monde venue écouter le discours d'une sorte de prédicateur. Le Zócalo, immense place au coeur de la vieille ville, était pris d'assaut. Obéissante, la foule a chanté "Si tu aimes Jésus-Christ, tape des mains" en agitant des dizaines de milliers de drapeaux blanc et bleu; c'était surréaliste. Tout autour, les vendeurs itinérants proposaient tristement leur pauvre marchandise, les amuseurs publics bonimentaient, les marchands de chicharrones (peau de porc frite), d'enchiladas, de barbe à papa s'affairaient... Je ne me lasse pas de ce spectacle. Mais comme toujours, ce qui me brise le coeur, ce sont les enfants des rues, et les femmes assises sur le trottoir qui mendient d'un air las, un enfant ou deux dans leur giron... Apparemment, il n'y a ici aucun filet de sécurité sociale, ce qui explique que chacun tente de survivre en inventant un petit métier. Dans le métro (très propre et moderne), de jeunes hommes munis d'un lecteur de CD portent dans un sac à dos quatre haut-parleurs qui crachent desd compils qu'ils offrent à 10 pesos pour 150 chansons. Il faut en vendre, des CD, pour réussir à gagner sa vie... Songez qu'un dollar canadien vaut 12 pesos!

Aujourd'hui, nous avons visité la maison de Frida Kalho et nous sommes baladés dans le quartier, envahi par une foule des Mexicains en promenade dominicale. Nous sommes entrés dans un marché couvert où nous avons mangé de délicieux burritos de boeuf cuit avec des feuilles d'agave, vendus par un type qui semblait au bord de l'apoplexie tant il avait la figure rouge. D'autorité, il nous a mis dans la main une bouchée de viande.
- Tiens, goûtez-moi ça, c'est bon, non? Allez, asseyez-vous. Chico! Donne ta chaise à madame! Combien, deux chacun?
On a avalé ça avec un jus de mandarines fraîchement pressé, ça nous tient au ventre depuis.
(Comme d'habitude je ne songe qu'à bouffer, je commence à comprendre pourquoi toutes les Mexicaines sont gorditas!)

Pierre et moi nous accordons à dire que les Mexicains sont incroyablement affables, on placote avec tout le monde dans notre espagnol un peu bancal, c'est tout à fait sympathique.

Demains, nous partirons probablement pour Querétaro, petite ville coloniale classée au patrimoine mondial de l'Unesco (comme plusieurs villes ici).

J'essaierai de vous mettre des photos la prochaine fois.

Hasta luego!