vendredi 30 avril 2010

Bruits

Au moment où j'écris ceci: Dans le café où je me trouve, à l'heure de la fermeture, le bruit du rideau de fer qu'on déroule. Celui de la télé où joue à tue-tête une telenovela qui a dû coûter très cher de larmes artificielles. Celui du moulin et de la machine à café, de la clim, des ustensiles qu'une serveuse secoue vigoureusement dans un seau de plastique pour je ne sais quelle raison obscure, des voitures qui passent dans la rue, des conversations des gens qui ne sont pas en train de surfer. Le cliquetis des claviers sur lesquels il faut piocher comme des sourds pour en tirer quelque chose, le choc de la vaisselle qu'on ramasse parce que le resto est sur le point de fermer (ce dont personne  ne semble se formaliser), le bip bip de la caisse qui additionne les additions.

La nuit, dans la ruelle autrement tranquille de mon hôtel: Des étudiants qui chantent l'hymne national après avoir fait honneur à la boisson nationale. Le raclement des poubelles d'acier que traînent sur le trottoir les employés du buffet chinois du rez-de-chaussée, et la musique qui les accompagne. Les conversations des gens de l'immeuble d'en face, qui veillent sur le toit.

Le matin: le chuintement des balais sur les trottoirs qu'on lave à grande eau savonneuse (à chaque commerçant son bout de trottoir). Les bus, les voitures, les motos, les zillions de taxis qui klaxonnent pour se signaler aux clients, le sifflet des agents de circulation. Les rideaux de fer qu'on remonte.


Le reste du jour: tout cela en même temps, plus le boniment du clown au Parque Alemada Central, qui m'apostrophe au moment où je passe devant lui: ¡Holà, señorita! Hao ale you? Waile ale you flom? Canada? Qué bonito!
Il y a toute une assistance hilare. Je lui dis qu'il peut me parler en espagnol, il me demande mon nom, et me voici engagée comme clownette de service. Il va me faire une sculpture en ballon, et il en profite pour commettre quelques calembours à connotation sexuelle dont les Mexicains raffolent. Au lieu de me demander quelle couleur je préfère, il me demande: «¿Qué sabor?» Je choisis rose. Il me demande si je les aime grosses ou longues. Je réponds que l'important, c'est ce qu'on fait avec. Il rigole. Il commence, ça a l'air absolument de ce qu'on pense qu'il va faire. Je me marre, il me dit que j'ai l'esprit mal tourné, tout le monde dans l'assistance se tord de rire. Il finit par me fabriquer un très innocent et très joli cygne rose, que je remets gracieusement à un jeune homme derrière moi, puisque je m'en vais faire des courses et que je n'ai absolument pas l'intention de traîner ça au mercado d'artesania.
Bruit des applaudissements.
La clim vient de s'éteindre, je suis la dernière cliente, on passe la serpillère derrière moi. Je rentre.

De retour à Mexico!

C'est quand même curieux: je suis rentrée à Mexico, après six heures de route, avec le sentiment de regagner une sorte de havre de paix, comme disent les dépliants touristiques. Six heures de route pour parcourir un peu moins de 300 km, mais quels paysages! Des orangeraies à perte de vue, des plantations d'agaves ponctuées de stands de pulque (un alcool fermenté fait à partir de la sève de l'agave, dont je ne désespère pas de trouver une version embouteillée), des vallées spectaculaires...
En arrivant en ville, j'ai trouvé les rues avenantes, les gens beaux, le climat confortable, la lumière splendide - bref, vive Mexico! Qui plus est, le Zócalo est quasi débarrassé de la hideuse structure qui abritait l'expo Mexico en tus sentidos, qui a pris fin la semaine dernière. On peut donc en admirer presque sans obstacle l'immensité et l'harmonie.
Le seul hic, c'est que je n'ai pu obtenir une chambre dans l'auberge internationale que je convoitais. Je loge dans un hôtel très correct qui me coûte trois fois rien (200 pesos, soit environ 16$), mais ça fait que je passerai vraisemblablement le week-end seule avec moi-même. Or, je trouve que je commence à manquer de conversation. Mais bon, il y a pire après l'enfer de Tuxpam (!!). L'autre truc, c'est que mes voies respiratoires me signalent avec insistance que la pollution à Mexico n'est pas une vue de l'esprit. Mais encore là, il y a pire...
Aujourd'hui, dernière tentative pour obtenir une chambre à l'Hostal Mexico City, puis direction Museo Bellas Artes pour acheter un billet pour le ballet folklorique de Mexico. J'irai ennsuite flemmarder au marché d'artisanat pour flamber quelques pesos supplémentaires. Je voudrais bien finir la journée au parc Garibaldi, repaire des mariachis, mais on dit que c'est un quartier un peu glauque. Comme femme seule, il y a quand même des trucs à éviter... Mais j'irai peut-être avant la nuit.

jeudi 29 avril 2010

Ah, et puis zut!

Quand j'ai écrit hier que le calme est une notion toute relative au Mexique, je ne croyais pas si bien dire. J'imaginais Tuxpam comme une paisible bourgade assoupie au bord d'un fleuve paresseux; je me voyais flâner au bord de l'eau, m'arrêter casser la croûte chez un marchand de tacos ambulant, lire ou observer les gens sous les arbres du Parque Central, filer passer une journée à la plage... Pfff!
Dites-vous bien une chose: si les guides de voyage ne parlent pas d'un lieu, c'est qu'il n'en vaut généralement pas la peine. Ni le Routard ni le Michelin n'avaient évoqué le moindrement Tuxpam. Mais le Let's go, lui, en faisait une description dithyrambique. J'en déduis que a) soit la ville a beaucoup, beaucoup changé depuis que le guide a été publié ou b) soit ses rédacteurs en fument du vraiment bon (Acapulco Gold?). Je penche pour la seconde option.
Forte de la recommandation de ce guide, je me suis dirigée vers l'hôtel La Parroquia. Vue sur le fleuve, pas cher, propre... Hum. Vue sur le fleuve, certes. Mais aussi sur le boulevard à quatre voies qui le longe. On aurait voulu attenter à ma santé mentale, on n'aurait pas fait autrement. Une ampoule fluo brillait de tous ses feux droit dans ma fenêtre, et le bruit de la circulation m'empêchait même d'entendre le son du vieux James Bond qui passait à la télé (avec Sean Connery, en anglais British sous-titré en espagnol, tout un exercice intellectuel, vous saurez). Mais c'est Guantanamó, ici! me suis-je dit (heureusement, Pierre m'avait laissé des bouchons pour les oreilles – merci, merci! –, ce dont Omar Khadr, le pauvre, n'a jamais bénéficié).
Du reste, ce n'est peut-être pas un hasard. Paraît que le Che et Fidel se sont réfugiés ici même, à Tuxpam, dans les années 50. Il y a d'ailleurs un musée à ce sujet quelque part de l'autre côté du fleuve. Mais je n'irai pas. Malgré la gentillesse de la dame qui tient l'hôtel, qui m'a vanté les mérites de la plage, de sa ville et de son carnaval qui a lieu en fin de semaine (imaginez le TAPAGE!!!), je file à Mexico illico. Tant qu'à entendre des voitures et des klaxons, autant que ce soit pour quelque chose.
J'y serai, ojalá, dans six petites heures.

mercredi 28 avril 2010

Papantla

Me voici à Papantla, où je suis venue essentiellement pour voir les ruines d'El Tajín, dont on dit qu'elles sont les plus vastes et les mieux conservées du pays. C'est sûrement vrai, et c'est assurément très beau, mais ce que je voulais surtout voir, ce sont les voladores, ces acrobates avant la lettre, qui descendent d'un mât de 30 m en tournoyant, attachés par la taille à une corde qui se déroule lentement et les amène jusqu'au sol. J'ai bien cru que je serais victime encore une fois de mon sens du timing (assez approximatif jusqu'ici), mais comme je descendais du camión (ainsi qu'on appelle les bus locaux), j'ai entendu l'air de flûte que joue le chef des voladores, perché au sommet du mât sur une minuscule plateforme circulaire que les Mohawks, qu'il paraît qu'ils n'ont pas le vertige, ils en seraient jaloux!
Quel spectacle! Pas aussi extrême que je l'aurais cru, mais gracieux, touchant, émouvant, surtout lorsqu'on songe que ce rituel existe depuis des siècles.
Après ma visite des ruines, que j'ai écourtée parce que l'orage menaçait, je suis rentrée tout à l'heure en ville et je suis allée m'asseoir au comptoir d'une taqueria, au marché. Le type qui faisait les tacos travaillait tellement vite, on aurait cru un film en accéléré! Mais le plus beau de l'affaire, c'est qu'il a pris le temps de me faire la causette en toute tranquillité et en rigolant avec les autres taqueros des comptoirs voisins: «Ah, vous avez vu, la Canadienne, c'est chez nous qu'elle est venue!»
Le taquero d'en face me faisait des mines désolées, tout le monde me regardait avec un air de gentille curiosité, notamment, m'a-t-il semblé, pour voir si j'allais m'étouffer avec la salsa roja. Mais j'ai fait pas mal de progrès depuis la Thaïlande, héhéhé!
En tout cas, 22 pesos (c'est-à-dire environ 1,70$) pour ces quatre succulents tacos et un Coca, surtout servis dans ce contexte, c'est franchement donné!
Je pars en fin d'après-midi pour Tuxpan, où je compte ne pas faire grand-chose sauf manger et me promener le long de l'eau, histoire de faire des réserves de calme avant de retourner à Mexico.
Mais le calme ici est une notion hautement relative, même dans les villages les plus reculés. Il y a toujours du bruit partout: klaxons, moteurs exténués des camiones, sifflet des agents de circulation, musique qui joue à tue-tête dans les autos, les boutiques et les restos, télé qui tonitrue, ventilos ou climatiseurs hors d'âge, carillon de la cathédrale... Une symphonie inachevable!

lundi 26 avril 2010

Xalapa

Mon amoureux est reparti hier matin pour la vraie vie, je suis donc seule pour la semaine et un peu déstabilisée. J'ai quitté Veracruz hier midi, il faisait une chaleur puante et étouffante, ce qui a largement influé sur mon choix de venir à Xalapa, capitale de l'État de Veracruz et ville universitaire qui abrite un musée ethnographique digne d'intérêt. J'avais lu que le climat y est frais et la vie culturelle assez riche. Vaya, me suis-je dit, je vais me faire des amis à l'auberge de jeunesse (qui, contrairement à son appellation, reçoit de plus en plus d'anciens jeunes comme moi, qui n'ont jamais cessé de les fréquenter) et j'irai au musée, puis à Coatepec, désigné pueblo magico par l'office du tourisme mexicain.

Mon sens du timing en a décidé autrement: le musée est fermé le lundi, et nous sommes exactement quatre clients à l'auberge de jeunesse, dont une jeune femme qui s'était mis en tête de s'exercer à la jonglerie sur la terrasse que surplombe ma fenêtre en écoutant de la musique comme une sourde dure d'oreille et malentendante. Les quilles de plastique tombaient toutes les 30 secondes sur le dallage (bong! boboing boing!!!)... Comme il était quand même 22h et que j'avais vraiment envie de dormir, je suis allée lui demander gentiment de bien vouloir bajar la música. Elle m'a regardée à travers ses dreadlocks comme si j'étais un caca de chien collé sous ses sandales indiennes. Je l'aurais grémie, comme disait ma mère, mais je me suis retenue. D'autant plus qu'elle a quand même obtempéré pour ce qui est de la musique. Tout en continuant de laisser tomber ses &@#~!!@€!! quilles par terre (je pense que les dreadlocks devant les yeux sont rédhibitoires).

Aujourd'hui, donc, journée à ne pas faire grand-chose. Xalapa n'est pas particulièrement jolie mais cache quelques coins assez sympa, comme un lavoir du XVIe siècle dans un square plein de fontaines ruisselantes et d'abreuvoirs destinés aux mulets des paysans qui venaient autrefois vendre leurs produits en ville. Les rues sont pentues, cabossées, tortueuses, dallées d'énormes pierres noires, et l'artère principale est bordée d'immeubles républicains assez pompeux. Demain, musée, et peut-être cap sur Papantla, près des ruines d'El Tajín, à quatre heures et demie de bus.

samedi 24 avril 2010

Vamos a la playa (bis)

Hier, prise d'une folle témérité, j'ai proposé à Pierre de reprendre une pirata pour aller voir Sontecomapan, bourgade nichée au bord d'une lagune à une petite demi-heure de Catemaco. Il y a là, avais-je lu, de jolies mangroves, peut-être la possibilité de faire un tour de barque et même d'aller à la plage.
Chose dite, chose faite, nous revoilà dans la boîte d'un pick-up, le nez au vent comme de jeunes chiens, humant de riches odeurs végétales (on aurait dit que quelqu'un avait renversé une bouteille de shampoing Herbal Essence!), parmi les frangipaniers, les hibiscus, les pothos géants et les pâturages d'un vert éblouissant.

Arrivés à Sontecomapan, les lancheros nous ont tour à tour abordés pour nous offrir de nous emmener en barque voir la mangrove (c'est la basse saison, les affaires sont calmes et la concurrence est féroce).
Un large panneau annonçait les tarifs des colectivos (bateaux-taxis collectifs), dont l'un allait à La Barra, une plage à l'embouchure de la lagune dont une dame nous avait dit la veille le plus grand bien. Nous avons sauté dans celui qui partait à l'instant (40 pesos par tête, soit environ 3,50$), pour parcourir un époustouflant couloir aquatique bordé de palétuviers, de lotus et de lentilles d'eau jusqu'à la lagune elle-même, qui brille au milieu de collines qui ont dû être des volcans, puis jusqu'à La Barra, bande de sable où ont poussé quelques maisons, entre mer et lagune.
La journée que nous avons passée là! La plage, immense et quasi déserte, est baignée d'une eau claire comme du cristal, agitée de vagues qui bercent tout doucement une écume phosphorescente. Nous étions les seuls touristes étrangers. Encore un lieu, nous sommes-nous dit, qui n'échappera pas longtemps à la cupidité des promoteurs. Profitons-en pendant qu'il en est encore temps!
Une vieille dame avait installé un étal où elle écaillait de toutes petites huîtres très fraîches et très douces, qu'elle servait accompagnées de sel, de citron vert et de l'incontournable chile.

Une autre femme, avec sont petit garçon tout édenté, vendait des mangues piquées sur un bâtonnet et arrangées en forme de fleur, encore là arrosées de citron, de sel... et de chile, bien sûr. Un homme offrait des tegogoles, petits escargots que l'on pêche dans le lac de Catemaco, servis avec devinez quoi. On n'en a pas voulu (je me méfie depuis mon expérience au Maroc), bien que le vendeur nous ait assuré que ça avait des vertus aphrodisiaques. Mon amoureux n'a pas besoin de ça, j'ai dit en rigolant. Il nous a souri de toutes ses dents en argent et nous a gentiment salués: Que les vayan bien!
Puis une très belle jeune femme du nom d'Elena m'a offert de lire dans les lignes de ma main. Elle ma promis une longue et bonne vie pleine d'amour et de prospérité, m'a conseillé de me méfier de deux personnes, un homme et une femme, qui se disent mes amis mais qui en réalité m'envient mon bonheur (qui que vous soyez, je ne vous en veux pas, c'est vrai que je suis bénie!), et elle m'a dit quoi faire pour enfin cesser de rêver à ma mère, morte depuis 34 ans. Tout ça pour 20 pesos. Si son truc marche, je lui en envoie 100 de mieux!
Voilà. Maintenant, nous rentrons à Veracruz, où mon amoureux prendra l'avion pour Mexico et de là pour Montréal, pendant que j'irai me la couler douce sur la Costa Esmeralda une petite semaine supplémentaire.

jeudi 22 avril 2010

Vamos a la playa!

Aujourd'hui, journée à la plage de Monte Pio. Deux heures de transport en pirata, un petit pick-up à cabine double dont la boîte est garnie de deux banquettes, où l'on peut apparemment entasser un nombre infini de personnes (normalement huit dans la boîte et cinq dans la cabine, plus le chauffeur).
Nous avons grimpé à l'arrière, histoire d'avoir plus d'air. Dur pour les fesses mais idéal pour apprécier le paysage de collines herbeuses, d'arbres gigantesques couverts de lianes, de bougainvilliers éclatants, avec la mer qui miroite au loin.
À la plage, une suite de gargotes dont le principal mérite est d'offrir un indispensable abri de palmes proposent toutes plus ou moins la même chose: poisson grillé, crevettes, langoustines, cerveza... Nous avons choisi celle dont les tables étaient le plus près de la mer et où les hamacs paraissaient en bon état. 
Étrange que personne ne connaisse cette région pourtant fabuleusement belle, me disais-je. Mais ça ne durera pas: le chauffeur de la pirata qui nous a ramenés à Catemaco (et qui passait par tous les bleds imaginables en cours de route) nous a expliqué que le gouvernement a le projet de construire une autoroute et de faire de la région un nouveau Cancun. Qué lástima!
Nous avons partagé les banquettes de la camionnette tour à tour avec une famille qui revenait d'acheter du poisson pour le vendre en ville, deux femmes et un homme avec leur récolte de feuilles pour cuire les tamales ainsi que plusieurs travailleurs agricoles, qui tous se sont montrés d'une exquise gentillesse, s'amusant de nos efforts pour parler espagnol, répondant à nos questions, en posant à leur tour...
Des gens simples, travailleurs, adorables.

mercredi 21 avril 2010

Périls de la jungle

Nous avons pris hier à midi le bus pour Catemaco. En fait, pour San Andres Tuxtla, d'où nous devions ensuite prendre une pirata (transport local en pick-up) jusqu'à Catemaco. Deux heures de route à travers un spectaculaire paysage de montagnes, de plantations, d'immenses prairies où des bœufs paissaient placidement.
À 12 kilomètres de San Andres, le bus a rendu l'âme: c'était la panne. Le chauffeur nous a annoncé qu'un autre bus allait venir nous prendre ahorita.
Évidemment, Pierre n'a pu s'empêcher d'aller écornifler un peu aux alentours, si bien que, quand le bus est arrivé, en effet quelques minutes plus tard, il était déjà hors de vue. Le temps que je le repère dans la foule des vendeurs ambulants et des écoliers qui sortaient de classe, que nous récupérions notre bagage dans la soute du premier car, le bus en question était parti. Bof, il y en avait un autre juste là devant et, ô surprise, celui-là se rendait jusqu'à Catemaco! Nous sommes donc montés dare-dare, et adelante! Un musicien est monté avec sa guitare et nous a poussé la chansonnette nordeña pendant que le bus bringuebalait sur une route défoncée. Dommage, impossible de prendre une photo, ça secouait trop.
Mais c'était hyper rigolo!
Catemaco n'est pas classé au patrimoine mondial. Ce n'est pas joli, c'est même assez funky, merci. Mais ça nous plaît pourtant infiniment plus que Tlacotalpán, peut-être justement parce que c'est moins léché, mais bien plus vivant.
À Catemaco, il n'y a rien. Rien qu'un lac splendide qui fait 17 km sur 19, des aigrettes neigeuses qui nichent par dizaines dans l'arbre devant notre hôtel, une jungle touffue que nous sommes allés voir ce matin en lancha (barque). Nous avons vu toutes les espèces possibles de hérons, des cormorans en quantité, des grandes aigrettes, des martins pêcheurs et même un crocodile, au moment précis où Gonzalo, notre guide, nous disait qu'il était fort rare qu'on en voie!
Il y a aussi une île où des chercheurs ont implanté une colonie de macaques de Thaïlande. Ils sont particulièrement laids (les singes, pas les chercheurs, quoique je ne les aie pas vus), avec des couilles aussi grosses et rouges que des pommes grenades. Nous ne nous sommes pas attardés, ce n'est pas la partie la plus intéressante de la visite, mettons...
Après cette épuisante excursion dans les profondeurs de la jungle mexicaine, nous avons remis à demain nos projets de jouer à Blue Lagoon. Surtout, ne pas trop se fatiguer. Justement, c'est l'heure de la sainte cerveza, que nous boirons à la santé de nos parents et amis, ces veinards qui échappent aux risques terribles que nous courons.

mardi 20 avril 2010

Voir Tlacotalpán et... euh...

Très joli. C'est un très joli village (environ 8000 habitants). Maisons d'un seul étage peintes de couleurs invraisemblables (on dirait des bonbons!) et couvertes d'antiques tuiles moussues, placettes dallées de marbre, bancs de fer forgé, trois églises très anciennes, très simples et très jolies (moi qui ne cesse de dire que je veux apostasier, c'est fou le nombre d'églises que j'ai visitées depuis que je suis au Mexique!). Je mettrai des photos plus tard parce que cet ordi va me rendre dingue, mais le coup d'oeil est fabuleux, avec la lagune qui traîne ses eaux paresseuses, la langue de terre de l'autre côté... 
Mais, aussi bien le dire, nous n'allons pas nous éterniser ici: en dehors de la fête de la Chandeleur (2 février), où on lâche des taureaux dans les rues et où tout le monde semble virer fou, il ne se passe pas grand-chose ici. Surtout un lundi soir! Nous avons vu l'heur de trouver un resto ouvert pour souper, et pareil pour le petit déjeuner. Nous partons tantôt pour un autre bled encore plus perdu, Catemaco, à deux heures d'ici, d'où nous comptons atteindre une plage où nous recréerons les inoubliables rôles de Brooke Shield et de je ne sais plus qui dans Le Lagon bleu.
M'en vais faire mon bagage.




dimanche 18 avril 2010

Veracruz

Samedi soir à Veracruz: muy caliente, je ne vous dis que ça!
Sur le Zòcalo, les musiciens se font la guerre: c'est à qui jouera le plus fort (et parfois le plus mal). Étourdis par tant d'effervescence, nous avons cherché un peu de calme sur une placette en retrait. Or, il y avait là un congrès de médecins, et pour l'occasion un orchestre installé sur une scène extérieure et des bailadores de danzon (une musique d'origine cubaine, mais en plus lent), les messieurs coiffés d'un panama blanc, les dames munies d'un éventail qu'elles agitent nonchalamment à un moment précis de la danse (mais nous n'avons pas vraiment compris lequel).

Nous avons invité une dame qui cherchait un siège à s'asseoir avec nous. Silvia Eugenia, adorable de gentillesse, nous a fait la causette toute la soirée, ne s'interrompant que pour accepter les invitations à danser d'un monsieur très élégant. Ce qu'ils étaient beaux à voir! Toute la place était occupée par les danseurs et par cette musique magique, lente, sensuelle à mort...
«Vous ne dansez pas? a demandé Silvia.
– C'est que, à côté de vous, nous nous sentons comme des éléphants», ai-je répondu en riant.
Je lui ai expliqué que, contrairement aux Veracruzanos, les Québécois qui veulent danser la salsa, le merengue et toutes ces choses, doivent APPRENDRE, suivre des cours, bref: travailler.
Elle n'en revenait pas!
Nous avons quand même risqué quelques pas après la première bouteille de vin, et Silvia a vite compris ce que je voulais dire.
Veracruz est une ville bruyante, décatie, désordonnée, presque affolante, mais l'air y est incroyablement doux (et parfois terriblement puant), les gens sourient, rigolent, il y a des enfants, des vendeurs ambulants et de la musique partout... J'adore!
* * *
Dimanche soir à Veracruz, toujours aussi caliente! À la fin d'un après-midi à la plage non loin de la ville (plage très correcte, contrairement à ce que prétendent nos guides Routard et Michelin), nous avons retrouvé Silvia sur la même placette que la veille. Tout endimanchée, toujours aussi pleine de joie de vivre, elle nous a conseillé un itinéraire pour le reste de la semaine, a abondamment dansé avec un autre monsieur très taciturne (photo), et nous nous sommes fixé rendez-vous dimanche soir, après le départ de Pierre pour Montréal via Mexico.
Après l'avoir quittée, nous nous apprêtions à rentrer à l'hôtel quand nous sommes passés devant un tout petit bar où jouait un groupe de salsa. Quand je dis qu'il y a de la musique partout, c'est qu'il y a VRAIMENT de la musique absolument PARTOUT. On ne pouvait pas rentrer comme ça, quand même! Nous nous sommes résignés à prendre un dernier verre et, la Modelo Oscura aidant, avons esquissé quelques pas de danse sous l'œil amusé des autres clients.

Là, maintenant, cap sur Tlecotalpan, village au bord d'une lagune, classé au patrimoine mondial de l'UNESCO. Je sens que je vais craquer!

vendredi 16 avril 2010

Puebla

Aujourd'hui, visite de trois églises plus baroques les unes que les autres. Des angelots coiffés de plumes qui descendent en cascades du plafond au plancher, des dorures, des volutes de stuc, des saints à la figure compassée en veux-tu en voilà, des Christs sanguinolents à l'air complètement consterné (j'ai commencé une collection), des Vierges en robe de dentelle et cape de velours, couronnées d'or et d'argent, des symboles païens à travers tout cela... On ne peut que s'émerveiller d'une telle profusion. Les Espagnols avaient de la main-d'œuvre en masse, ils en ont profité. On dit que, à Cholula, Cortes avait juré de construire 365 églises, une pour chaque jour de l'année. Heureusement qu'il s'est arrêté avant, on ne saurait plus où donner de la tête!
 Autrement, Puebla est une ville étrange, à la fois très touristique et extrêmement réservée, et sans doute la plus parisienne des villes mexicaines. Il y a au centre-ville un immeuble de style Eiffel, en acier, avec les boulons et tout, construit par une firme française, et un passage couvert dont la façade s'orne d'une splendide verrière art déco. Les façades des immeubles coloniaux sont couvertes d'azulejos (tuiles de céramique), c'est spectaculaire.
La grand-place bourdonne d'activité, ça grouille de monde, des Mexicains pour la plupart. Nous sommes toujours épatés par la quantité de bébés qu'il y a partout. Les parents les portent dans leurs bras comme un précieux colis (pas de poussettes ici, c'est impossible à manœuvrer!) et, dès que les petits savent marcher, ils trottinent placidement aux côtés de papa ou maman, ou d'un grand frère extraordinairement attentionné. La famille, ici, est une valeur cardinale qui n'est dépassée que par la piété, et encore.
Il paraît que Puebla est l'une des capitales gastronomiques du Mexique. Je ne sais trop qu'en penser. Nous n'avons pas encore eu notre baptême de mole poblano (sauce à base de cacao, d'amandes et d'épices diverses, que l'on sert sur du poulet), mais j'ai tenté avant-hier une expérience avec le pipián (sauce verte à base de graines de citrouille) qui s'est avérée fort décevante.
Heureusement, la soirée a été sauvée par un homme qui s'est amené au resto vers 20h et s'est installé au piano. Nous étions les seuls clients, nous avons noué conversation et fini par passer la soirée en sa compagnie. Il avait dans ses cahiers quantités de vieilles chansons françaises que je me suis fait un plaisir de lui transcrire phonétiquement pour qu'il puisse les chanter dans le texte. Je signale à mes collègues de La Presse que LUI, au moins, a su apprécier mon talent vocal, héhéhé!

En fin de compte, pour revenir à la cuisine, ma préférée est encore celle des rues: les généreuses quesadillas (celles d'aujourd'hui, farcies de fleurs de courgettes et d'un très bon fromage frais, étaient franchement exquises), la guacamole avec la bière de l'apéro, la sopa azteca (un bon potage tomaté garni d'avocat dans lequel, cela va sans dire, baignent des lanières de tortilla frite)...
On mange très bien pour trois fois rien dans ces petites gargotes, j'adore l'odeur des tortillas chaudes et je m'émerveille sans cesse de la quantité de façons qu'on a inventées pour les cuisiner afin qu'on n'ait pas l'impression de bouffer sempiternellement la même chose!

N'empêche, hier, nous avons dépensé l'équivalent de trois nuits d'hôtel (il faut dire que l'hôtel ne nous coûte vraiment, mais vraiment pas cher) dans un restaurant espagnol assez péteux, où nous avons dégusté une côte de bœuf grillée digne d'Obélix. Que voulez-vous, je n'ai aucun penchant pour le végétarisme, il me faut ma tranche de cadavre de temps en temps...

Demain, cap sur Cacaxtla (je n'arrive pas à prononcer ce mot), où il y a paraît-il des fresques préhispaniques admirablement conservées. Pierre y tient beaucoup. Pour ma part, je commence à être un peu saturée des déesses de la fertilité (grandes oreilles, grosses cuisses, bouche en cul de poule), je finis par trouver qu'elles se ressemblent toutes, mais bon. Les fresques de Cacaxtla sont apparemment éblouissantes, nous verrons bien.

Ensuite, direction Veracruz, pays du danzón et de la marimba... et enfin la mer! La Costa Esmeralda, plus précisément. J'espère qu'elle porte bien son nom...

mardi 13 avril 2010

Petite journée

Le lac de Pátzcuaro a déjà été l'un des plus beaux du Mexique, à ce qu'on dit (vrai, il n'y en a que trois ou quatre, mais bon). Cerclé de montagnes, émaillé de villages, serti de quatre îles elles-même toutes semées de maisons aux toits de tuiles rouges, il fait plusieurs kilomètres de longueur. Autrefois, dans des barques à la fragilité affolante, les pêcheurs capturaient au filet de petits poissons qui avaient fait la réputation de la gastronomie de la région.

Plus rien de cela n'existe. Le niveau du lac n'a cessé de baisser depuis 25 ans. Son eau, couleur café au lait, est envahie d'algues qui l'étouffent; les poissons sont en voie d'extinction, les pêcheurs ne capturent plus rien. Les villages, exsangues, offrent le triste spectacle de communautés qui dépendent quasi exclusivement du tourisme: les enfants courent après les gringos pour leur vendre de menues marchandises, les femmes offrent d'un air las des tissages et des poteries tous pareils... Nous avons passé la journée à visiter quelques villages, dont l'un où se trouvent quelques ruines purépechas (pyramides de pierre au milieu d'un vaste champ, quelques vestiges d'une vie agricole...). En fin de compte, nous avons négocié avec un jeune homme le prix d'un passage en lancha jusqu'à la plus grande des îles, que nous avons parcourue de part en part avec un sentiment grandissant de consternation. Nous avons repris un bateau pour regagner avec soulagement la douce animation de Pátzcuaro.

Demain, retour vers Morelia, puis direction Veracruz, sur la Costa Esmeralda, en passant peut-être par Taxco ou Puebla, nous verrons. En attendant, nous allons souper dans un de ces restos qui offrent à peu près tous les mêmes plats au menu, qui se révèlent immanquablement différents de ceux que l'on avait commandé la semaine d'avant et qui, pourtant, portaient le même nom. Je découvre des mots que mon dictionnaire ne contient pas, mais heureusement les Mexicains, toujours aussi affables et gentils, prennent le temps d'expliquer, de réexpliquer, de répéter...

lundi 12 avril 2010

Patzcuaro

Ce matin, après le petit déjeuner de pain grillé et de café de olla (parfumé à la cannelle), nous avons sauté dans un taxi. Nous souhaitions nous rendre au terminus de bus pour en prendre un de seconde classe vers Patzcuaro, à une heure de route, en principe. Le chauffeur nous a plutôt proposé de nous emmener à la sortie de la ville, où un taxi collectivo nous emmènerait droit au village en moins de temps et pour moins cher qu'un bus. Chose dite, chose faite.
Nous sommes donc arrivés à Patzcuaro, un village tellement vieux, tellement différent de tout ce que nous avons vu jusqu'ici qu'on pourrait se croire dans un tout autre pays. Ici, les maisons sont faites de pisé, le bas est peint en rouge sang-de-boeuf, le reste blanchi à la chaux, et les toits sont couverts de tuiles. Les gens ne sont pas riches, ça se voit clairement, mais tous nous saluent fort gentiment. La grande place est bordée de palais coloniaux plus jolis les uns que les autres, mais cela ne se devine pas de la rue. Il faut pousser les antiques portes cochères pour découvrir des jardins, des fontaines, des balcons, des chambres fraîches et ombragées qui contrastent avec les rues poussiéreuses et bruyantes où se pressent des vendeurs ambulants, des familles, de petites vieilles édentées et rabougries, des ados en uniforme scolaire, toute une vie qui grouille et palpite sans arrêt.
Nous logeons dans un charmant petit hôtel au patio tout fleuri, une chambre impeccable avec salle de bains privée qui nous coûte la fortune de 250 pesos pour deux, ce qui équivaut à environ 20$ canadiens. Il fait bien plus frais ici qu'à Morelia, la petite laine sera de rigueur ce soir pour la première fois depuis notre arrivée au Mexique. Tellement que, même pour l'heure de la Sainte Bière, sous les arcades de la place qui est dit-on la plus grande d'Amérique, il a fallu que je mette mon châle. La grosse misère, quoi...

samedi 10 avril 2010

Le rêve en couleur

Nous voici à Morelia, austère ville toute de pierre rosée, après deux jours à Guanajuato, où nous avons bien cru laisser notre coeur. Ces maisons aux couleurs vives, accrochées à flanc de colline comme la construction fantaisiste d'un enfant! Ces églises aux retables d'or, qui tiennent plus du délire religieux que de la simple foi... Et puis les sons de Guanajuato - le chuintement du balai sur les pavés qu'on lave tous les matins à grande eau savonneuse, le clocher qui sonne l'heure, le quart d'heure, la demie, les trois quarts (oui, bon, la nuit c'est un peu embêtant, mais moins que la meute de chiens qui se criaient des bêtises sans qu'on sache pourquoi), le coq qui pousse ses cocoricos (oui, bon, ca aussi, c'est un peu embêtant, mais bon, on est en vacances, on n'a qu'à se rendormir!)... 
Et puis il y a les callejoneadas, qui sont sans doute la chose au monde la plus charmante. Autrefois, il s'agissait d'étudiants qui, habillés à la mode espagnole du XIVe siècle, se mettaient à chanter dans les venelles de la ville (les callejones). Les gens les suivaient et cela créait une sorte de fête spontanée. 
Maintenant, les musiciens vendent des billets en prévision de la chose, ce qui lui enlève bien sûr son aspect improvisé, mais tout de même, il faut voir (et entendre) l'atmosphère que cela crée! Nous étions assis bien tranquillement dans un adorable parc (la ville en est pleine), à siroter le reste du vin que nous avions acheté pour souper, quand nous avons entendu cette rumeur de fête. Nous avons suivi le son... Surprise! Dans cette étroite venelle, au pied d'un vénérable portail, ils étaient bien une quinzaine de musiciens, et sûrement une centaine de spectateurs, à chanter en choeur un air traditionnel très gai, très patriotique... C'était magnifique!
Guanajuato est une toute petite ville (enfin, comparativement à Mexico, ou même à Querétaro). On passe son temps à tourner en rond dans ses venelles labyrinthiques, mais tout est si joli, si plein de bruits et d'odeurs et de surprises à chaque détour l'on n'a cure de revenir sans cesse à son point de départ.
Tout commence toujours au Jardín de la Union, ombragé par d'immenses figuiers taillés comme des moustaches de colonel. Là, à l'heure de l'apéro (enfin, de ce qui est normalement l'apéro pour nous, mais ici rien ne marche comme on en a l'habitude), les mariachis commencent à se rassembler sur les bancs de fer qui bordent la place, devant les terrasses des restaurants. Quand les consommateurs commencent à être assez ivres, les mariachis commencent leurs sollicitations: 150 pesos por una cansión, on serait bien malvenu de refuser, depuis tantôt qu'on profite de ce que les autres ont payé... Va por una cansión, bientôt suivie d'une autre, puis d'une autre encore. Mine de rien, mon amoureux a dépensé pour cinq chansons davantage que ce que nous coûtait une nuit d'hôtel, mais quand même, La Paloma chantée juste pour nous par huit beaux hommes habillés en toréadors, vestes brodées et pantalon ajusté, comme dit l'autre, ca n'a pas de prix... Nous avons même dansé quelques pas de valse, ou de je ne me souviens plus très bien quoi, mais enfin, c'était trop romantique.
Nous avons donc quitté Guanajuato hier soir apr}es avoir rêvé d'y acheter une maison póur faire posada (auberge) à la retraite. Je n'ai pas dit mon dernier mot.
Aujourd'hui, nous sommes donc à Morelia (environ 2 millions d'habitants), une ville complètement différente de Guanajuato, mais qui ne manque pas de charme non plus. On nous promet pour ce soir une fiesta muy grande sur la grande place, avec musique in vivo, danse et tout le toutim. En attendant, nous sommes allés traîner du côté du marché, où nous avons dégusté pour même pas le prix d'un Big Mac un caldo de camarones (soupe de crevettes) digne des plus grandes tables, arrosé de deux cervezas bien froides. Miam!
Voilà, demain, peut-être encore un peu de flâneries à Morelia (il y a bien encore quatre ou cinq églises que nous n'avons pas vues), puis cap sur Patzcuaro, un peu plus au sud, près d'un lac qui a dit-on déja été le plus beau du Mexique mais qui a paraît-il perdu bien du charme. Nous verrons. A ver, comme disent les Mexicains.

mardi 6 avril 2010

Beautés coloniales

Après la folie de Mexico, Querétaro nous a paru bien paisible. Nous y sommes parvenus après trois heures et demie de route dans un car ou jouait à tue-tête un film particulièrement criard avec Cameron Diaz (les Mexicains adorent le bruit). La ville compte plus ou moins un million d'habitants (nous avons cru comprendre que ça augmente très vite), mais on traverse le centre historique en une petite demi-heure. Ça, bien sûr, c'est si on s'empêche d'entrer dans les innombrables églises que l'on croise, et on aurait bien tort: on y trouve de délirants et immenses retables dorés à la feuille, des toiles anonymes dont l'imagerie sanglante m'étonnera toujours, des Christs naïfs étendus dans des chasses vitrées... et puis il y fait toujours frais, ce qui n'est pas de refus sous ce soleil de plomb!

C'est d'ailleurs à cause de cette chaleur qui devient écrasante vers 15h que nous avons adopté le rythme mexicain: petit-déjeuner vers 9h, repas consistant vers 14h, sieste jusqu'à 18h, promenade dans les rues piétonnes de la vieille ville et ses jolies placettes ombragées, souper léger plus tard en soirée. Cela, joint à l'architecture arabo-andalouse des maisons, nous ferait croire sans mal que nous sommes en Espagne. Mais les Mexicains ont une sorte de joie de vivre, de gentillesse intrinsèque, de spontanéité que l'on ne trouve peut-être pas chez les Espagnols.

Tout à l'heure, nous avons assisté à une procession religieuse, avec fanfare et pétards, en l'honneur de la sainte patronne de la province ou de la région, je ne sais trop. J'aurais cru que, Pâques étant tout juste passé, on aurait pris un petit moment de repos, mais Pierre croit qu'il faut vite relancer la business pour que ça ne s'essouffle pas. Rien n'est moins sûr: pendant que je pioche ces mots sur un clavier tout collé, j'écoute des airs de Noël à la sauce celtique. Ça ne s'invente pas!

Demain, direction Guanajuato, puis Patzcuaro, autres villes citées au patrimoine mondial de l'UNESCO. On va encore être obligés d'entrer dans plein d'églises et de musées et de palacios, de prendre des photos de maisons aux murs ocre ou roses aux balcons de fer forgé remplis de fleurs, de faire la sieste même si on n'est pas fatigués, pffff.

dimanche 4 avril 2010

Mégapole mégafolle


Nous y sommes donc. Arrivés vendredi soir assez exténués par le voyage, nous avons vite mis de côté nos velléités d'aller explorer la ville tout de go. Direction l'hôtel, la Casa Vieja, qui porte bien son nom. Caché dans une ruelle borgne de la Zona Rosa, il compte quatre dortoirs, plus deux chambres au confort spartiate aménagées dans des cubes de béton construits en ajout sur le toit. Tout est un peu de guinguois, mais propre. Et puis, du moment qu'aucune bestiole indésirable ne fait mine de vouloir partager notre lit...

Mexico, maintenant. Pfiou! Ça tonitrue, ça klaxonne, ça s'interpelle, ça mange constamment, ça n'arrête pas! Samedi, nous avons marché dans la vieille ville, visité quelques musées, sacrifié au rite de la sainte bière, comme il se doit, dans un estaminet inconnu des touristes et, bien sûr goûté à quelques spécialités du cru, notamment une tostada bleue couverte de frijoles, de cactus haché, de salsa et de fromage.

Le Palacio Nacional est une splendeur, et les fresques de Diego Rivera, dans le plus pur style réalisme soviétique, valent vraiment le coup d'oeil. Au centre du Zocalo, le gouvernement a dressé une structure assez laide, où l'on présente une expo de photos magnifiques de Willy Souza à l'occasion du 200e anniversaire de l'indépendance. C'était beau de voir les Mexicains regarder ces portraits d'eux-mêmes et des beautés de leur pays comme s'ils ne s'étaient jamais vus aussi beaux, riches d'une culture millénaire et d'une histoire tourmentée.

Le soir venu, il y avait une mer de monde venue écouter le discours d'une sorte de prédicateur. Le Zócalo, immense place au coeur de la vieille ville, était pris d'assaut. Obéissante, la foule a chanté "Si tu aimes Jésus-Christ, tape des mains" en agitant des dizaines de milliers de drapeaux blanc et bleu; c'était surréaliste. Tout autour, les vendeurs itinérants proposaient tristement leur pauvre marchandise, les amuseurs publics bonimentaient, les marchands de chicharrones (peau de porc frite), d'enchiladas, de barbe à papa s'affairaient... Je ne me lasse pas de ce spectacle. Mais comme toujours, ce qui me brise le coeur, ce sont les enfants des rues, et les femmes assises sur le trottoir qui mendient d'un air las, un enfant ou deux dans leur giron... Apparemment, il n'y a ici aucun filet de sécurité sociale, ce qui explique que chacun tente de survivre en inventant un petit métier. Dans le métro (très propre et moderne), de jeunes hommes munis d'un lecteur de CD portent dans un sac à dos quatre haut-parleurs qui crachent desd compils qu'ils offrent à 10 pesos pour 150 chansons. Il faut en vendre, des CD, pour réussir à gagner sa vie... Songez qu'un dollar canadien vaut 12 pesos!

Aujourd'hui, nous avons visité la maison de Frida Kalho et nous sommes baladés dans le quartier, envahi par une foule des Mexicains en promenade dominicale. Nous sommes entrés dans un marché couvert où nous avons mangé de délicieux burritos de boeuf cuit avec des feuilles d'agave, vendus par un type qui semblait au bord de l'apoplexie tant il avait la figure rouge. D'autorité, il nous a mis dans la main une bouchée de viande.
- Tiens, goûtez-moi ça, c'est bon, non? Allez, asseyez-vous. Chico! Donne ta chaise à madame! Combien, deux chacun?
On a avalé ça avec un jus de mandarines fraîchement pressé, ça nous tient au ventre depuis.
(Comme d'habitude je ne songe qu'à bouffer, je commence à comprendre pourquoi toutes les Mexicaines sont gorditas!)

Pierre et moi nous accordons à dire que les Mexicains sont incroyablement affables, on placote avec tout le monde dans notre espagnol un peu bancal, c'est tout à fait sympathique.

Demains, nous partirons probablement pour Querétaro, petite ville coloniale classée au patrimoine mondial de l'Unesco (comme plusieurs villes ici).

J'essaierai de vous mettre des photos la prochaine fois.

Hasta luego!

jeudi 1 avril 2010

Je brûle!

Je me parle en espagnol. Je rêve de cathédrales, de volcans, de tequila, de chevauchées en bord de mer, de jalapenos et de cerveza, d'enfants souriants et de marchés colorés.
Aujourd'hui, avant de me rendre au travail, j'ai acheté une grande carte du Mexique, après avoir longuement hésité entre deux ou trois. Pour faire bonne mesure, même si je potasse le Michelin pratique depuis plusieurs semaines, j'ai quand même acheté le Routard, parce que l'autre ne me plaisait pas tellement.
Pourtant, en déverrouillant ma porte, ce soir, pour rentrer chez moi, j'ai eu un flash, un truc idiot: et si je n'en revenais pas? Mon Dieu, tout le bordel qu'il y a ici! Quel cadeau à faire à mon fils. Le ménage qui attend. Et mon testament qui n'est pas à jour. Tssss. Je vieillis, je pense.